jeudi, avril 12, 2007

J'attends mes primeur, J'élève mes primeurs


En attendant l'ouverture de la campagne des primeurs 2006, qui sera sûrement palpitante... j'ai retrouvé ça, publié en 2005 sur un vieux blog peu accessible.


16 avril 2005: A commander: J'attends mes primeurs, J'élève mes primeurs.


Ces deux nouveaux ouvrages pratiques et disponibles en souscription, publiés par deux éditeurs différents, mettent en lumière les caractéristiques profondes de l'acte de conclure une "transaction" en primeur. Une "transe-action" en effet, car cet acte est à la fois une action au sens kantien du terme ( quoique...), j'agis, j'évolue, je me construit en construisant ma cave, et une transe, où l'on trouve autant la peur de manquer, la ruée pour être-le-premier-servi ( comme à la cantine), un état second qui nous entraîne loin du rationnel, qu'une danse propriatoire exécutée à l'intention de celui qui peut satisfaire le voeu ( en l'occurence, le propriétaire de Pomerol).


Dans J'attends mes primeurs, tout découle du début: avant il n'y a rien, pas de souvenirs, que des bruits confus. La gestation du millésime, on le sait, obéit à des règles assez générales. Pour l'acheteur, se succèdent dans l'ordre la météorologie de l'année dont il n'a qu'une vague idée - les premières revues de presse annonçant "qu'on a vendangé les Graves blancs en août" - puis vers novembre l'annonce par la presse généraliste d'un millésime exceptionnel, voire jamais vu depuis 1893 - enfin en mars quelques signes annonçant qu'il y aura des dégustations en avril. Tout cela ne sont que des prémices.
La conception des primeurs aura lieu dans un savant ballet, d'avril à juin. C'est là qu'intervient la transe dont nous parlons plus haut. Elle tient au concept de "prime-heure": si je ne suis pas sur les rangs à la prime heure, ce sera trop tard tout-à-l'heure. Mais la prime-heure n'annonce pas son heure. D'où cette angoisse permanente de l'attente. D'où cette veille permanente de l'intellect, source de névroses et d'insomnies.
L'achat effectué, l'angoisse devrait normalement retomber. Il n'en est rien: d'autres questions viennent se rajouter aux questions: serai-je livré? Est-ce que j'ai fait des économies? Est-ce que le vin sera bon? Est-ce qu'il sera moins cher en FAV (Nous n'avons malheureusement pas pu découvrir la signification de ce sigle réservé aux initiés)?
D'autant plus que la structure linéaire du système des primeurs se complique depuis quelques années d'une superposition de couches qui accroît l'anxiété. En témoigne ce discours relevé dans le cabinet d'un primanalyste réputé:
"Je ne sais plus quoi faire. Tout me dit que je dois acheter des 2004, bien que les vins soient chers et le millésime moyen; tout - car il faut que j'achète des primeurs chaque année. En même temps, quand je vois que Cheval-Blanc 2003 est encore en vente primeur avec une augmentation négligeable, j'ai bien envie d'en prendre; je n'en avais pas pris l'année dernière, car je trouvais ça trop cher. Mais c'est peut-être un meilleur rapport qualité-prix que les 2002, bien que ça soit bien plus cher que les 2001 de l'hyper d'en face. Je pensais financer les 2004 en revendant un peu de 2000, mais ils valent la moitié d'en primeur, on dirait des 1997!..." etc,etc... Une logghorée préoccupante et qui touche de plus en plus de patients, à laquelle le thérapeute ne peut pour l'instant apporter qu'une écoute attentive, sans proposer de solution.


J'attends mes primeurs, Editions de l'Expectative, 120 pages, présenté en coffret bois. Livraison au premier semestre 2007. Tarif de souscription: jusqu'au 30 juillet 2005: 30 euros. Du 30 juillet 2005 au 30 juillet 2006: 35 euros. Du 30 juillet au 31 décembre 2006: 40 euros. En librairie début 2007: 20 euros.


J'élève mes primeurs est un ouvrage sensiblement différent, s'il aborde le même processus. On peut le lire comme un thriller où se succèdent les coups de théâtre. L'objet psychanalityque repose sur la fixation. On connaît depuis Freud le caractère de la fixation. Il s'agit ici de la fixation des prix de sortie des primeurs, selon un process complexe où l'affirmation de l'ego tient une part dominante. "Si mon prix est bon, je vends bien mon vin et je suis considéré; si mon prix est trop élevé, je ne vends rien; si mon prix est trop faible, les voisins se foutent de moi". L'enjeu est vital. Le "prix-meurt" ne donne qu'une seule chance. Sa fixation obéit autant à la logique qu'à l'intuition.
Ensuite, c'est l'élevage proprement dit. Pour ça, on fait comme d'habitude.


J'élève mes primeurs, collectif, Fédération de l'Agriculture et de l'Elevage, 12 pages, présenté en coffret bois. Livraison au premier semestre 2007. Tarif de souscription jusqu'au 30 juillet 2005: 30 euros. Sera sûrement épuisé ensuite.

Aucun commentaire: