samedi, avril 09, 2016

Bordeaux primeurs 2015 : mercredi : Margaux

Le chai du Château du Tertre est sombre, ce qui est flatteur pour les vins, mais pas toujours facile pour les juger. Dans un millésime où les cabernets sont grands, les Margaux m'ont paru inégaux, les meilleurs et les moins bons de l'ensemble des quatre grandes appellations du Médoc. Bien entendu, les assemblages que je donne, recueillis par Bleuzen, sont ceux du millésime 2015, sinon ils n'auraient aucun intérêt. Parmi les Margaux, pour moi, un duo de tête : Kirwan (50% CS, 35% merlot, 10% CF, 5% PV), tout en force, complexe, très long, et Cantenac-Brown (61% CS, 39% merlot) très généreux. Ce sont de beaux vins de garde.
Du Tertre, Ferrière (63% CS, 33% merlot, CF et PV) et Monbrison forment un beau trio de vins typés Margaux ; le premier sombre et très jeune, le second fin, floral, vêtu d’une robe chatoyante, le troisième riche et fleuri.
J’aime ensuite Angludet (50% CS, 40% merlot, 10% petit verdot), sombre, souple en bouche, avec son amertume de jeunesse.
Giscours (70% CS, 25% merlot, 5% petit verdot), pas très dégrossi, généreux et terrien. Dauzac ((72% CS, 28% merlot) tout en finesse et Malescot sur le fruit. Desmirail (60% CS, 35% merlot, 5% petit verdot), facile.
Un peu plus loin, Labégoce (50% CS, 44% merlot, PV et CF) a du creux en bouche. Rauzan-Gassies, pas très mûr, me déçoit par rapport à 2010 et, toutes proportions gardées, 2011 et 2012. Prieuré-Lichine n’est pas mal, Marquis de Terme assez fluide, Siran clair, boisé et dur.
On se presse pour goûter Brane-Cantenac ( 70% CS, 26% merlot, cabernet-franc carmenère), une révélation du millésime ; mais nous l’avons goûté comme un bon vin, sans rien qui le mette en tête. Le second vin, Baron de Brane, privilégie les merlots. Rauzan-Ségla avait un nez pointu, une bouche incisive, un charme léger.

Est-ce pour fêter ce millésime joyeux, ou pour renfrogner quelques vieux Chartrons que le chai est pavoisé de peintures enfantines? En tous cas, cela fonctionne.
Crédit photo: Martine Bleuzen du Pontavice

Bordeaux primeurs 2015 : mercredi : au Tertre

Crédit photo: Martine Bleuzen du Pontavice
Le château du Tertre est en reconversion en biodynamie, vaste entreprise quand on cultive 50 hectares. Nous somme accueillis par deux représentants de la race de Giscours, sauvée de la disparition grâce notamment au vigoureux taureau Byzance, avec qui je fais mon 2° selfie.
Sera-ce le dernier ?

Ici on ne craint pas de cirer les pompes à la presse.
La dégustation de l’Union des Grands Crus est celle des Margaux.

vendredi, avril 08, 2016

Bordeaux primeurs 2015 : mercredi midi : déjeuner

L’art de déguster à l’Union des Grands Crus, c’est aussi l’art de choisir où déjeuner. Hier nous sommes passés à Gruaud-Larose en fin de service. Les restes étaient de beaux restes. Le repas était assuré par le restaurant Le Saint-Julien, de Saint-Julien. Plus tentateur qu’un traiteur. Revenant de Saint-Estèphe vers Arsac pour goûter les Margaux, nous faisons logiquement halte à Gruaud-Larose.

Le buffet est superbe et raffiné : des huîtres, une salade de légumes anciens, nos premières asperges de printemps… Tout ce qui peut l’être et doit l’être est déglacé au rouge de Gruaud. Le maigre (un gros poisson d'ailleurs un peu gras) est très bien cuisiné.
Sur table, un vin blanc de Malagar (près de Langon, Mauriac bien sûr) de 2011 dont on apprend que la vigne appartient au propriétaire de Gruaud. Très bon, pas un Graves, autre chose, assez charnu. Et un délicieux Gruaud 2003 bourré de parfums. On peut boire les 2003.
Pour Bleuzen, en 20 ans de primeurs, c’est sans doute le plus beau buffet (pourtant, Desmirail...). Donc elle va remercier le chef du Saint-Julien. Et nous partons pleins de reconnaissance vers le Château du Tertre.
Crédit photo: Martine Bleuzen du Pontavice

Bordeaux primeurs 2015 : mercredi matin : Lafon-Rochet

Dégustation des Saint-Estèphe puis des Pauillac.
Pour les premiers, courte délégation, mais tout est bon. Cos Labory est corsé mais frais. Les Ormes de Pez et Phélan-Ségur sont rond et pleins, abordables. Pez et Lafon-Rochet sont sur le fruit, charnus, un peu courts.

Le niveau des Pauillac ( 12 vins) est très élevé. Les cabernets sont de grande qualité.
Grand-Puy-Lacoste, Pichon-Baron et Pichon-Comtesse ont des nez nobles, une grande structure, une finale longue. Beuzen retrouve une dame de Pichon-Comtesse chez qui nous avions fait il y a 17 ans un reportage pour La cuisine des châteaux du Bordelais. On évoque le repas des accabailles ce jour-là avec la Générale de Lencquesaing (c'est-à-dire la gerbaude. Le repas des vendanges, quoi!).

J’aime bien Batailley dans un style plus léger. Lynch-Bages, le plus coloré, est dominé par un nez vanillé, très plein en bouche avec un peu de rusticité. Clerc-Milon aussi est un poids lourd avec un corps concentré. Lynch-Moussas est plus léger et d’un beau fruit.

Un peu plus loin à mon goût, Armailhac a un nez fruité intense, une bouche douce, de petits tannins avec de l’amertume de jeunesse. Grand-Puy-Ducasse est fin, avec un joli nez de sous-bois. Haut-Bages-Libéral semble moins mûr. Croizet-Bages est clair, fruité, d’abord et de fin faciles.
Crédit photo: Martine Bleuzen du Pontavice

jeudi, avril 07, 2016

Bordeaux primeurs 2015: mercredi matin: Bages

Mercredi matin : Bages
Nous commençons par visiter le village de Bages près Pauillac.
Derrière le château Lynch-Bages, c’est un vrai village français qui doit ravir les touristes étrangers. Le boucherie propose du bœuf de Bazas et de l’agneau du Mont-Saint-Michel. Au bazar, on trouve de tout, y compris mes Miscellanées du vin.
J’achète le livre de Monsieur Jean-Michel Cazes – son bureau est juste à côté et j’ai droit à une dédicace de ce grand monsieur.
Tiens ! Les bureaux du château La Bécasse sont ici. Ce cru migrateur dont j’ai déjà parlé s’est donc posé sur le plateau de Bages.
Crédit photo: Martine Bleuzen du Pontavice

Bordeaux primeurs 2015: mardi à Gruaud-Larose

Bon accueil, une tour moderne s’est dressée en acier brossé, du haut de laquelle on voit au-delà de la rivière. On a raté le déjeuner, on y reviendra demain sûrement.

Saint-Julien est représenté, maigrement. L’Union des grands crus comprend les crus classés, dont un certain nombre ne daignent pas s’abaisser aux dégustations de terroir, le premier étant Las-Cases (grand vin tannique et abrupt dans sa bouteille comme la réception au domaine), et quelques-uns des meilleurs bourgeois.

Toujours à la pointe de la nouveauté, j'ai fait mon premier selfie.
Mes vins préférés :
Lagrange. Robe sombre, nez charmeur, du volume, profond, belle longueur et beaux tannins
Langoa-Barton : Robe claire, nez fin et intense, en bouche pas corsé mais très défini, finale très longue, très fin
Gloria : Robe sombre, nez de barrique, fruits rouges, attaque agréable, bouche arrondie et fraîche, soyeux, belle finale, un régal
Branaire-Ducru : Bonne attaque, bon grain, fruité
Léoville-Barton : mal noté comme d’habitude. Tellement jeune
Beychevelle : Clair, doux, finale amère, pas au niveau
Un niveau d'ensemble très élevé pour ces 2015.
Crédit photo: Martine Bleuzen du Pontavice

mardi, avril 05, 2016

Bordeaux primeurs 2015: lundi, Villemaurine

Départ avec Bleuzen pour Saint-Emilion.
Cette année, l’Union des Grands Crus ne commence que le mardi. Nous allons goûter les grands crus classés au Château Villemaurine. Comme d’habitude l’accueil est superbe. Je m’enferme dans le « bocal » des journalistes peu fréquenté ce matin.


2015 a une excellente réputation, mais on craint des degrés d’alcool trop élevés, comme souvent.
Petit rappel : les 2012 étaient assez légers, de semi-garde, et on en boit déjà de délicieux. J’avais été globalement déçu par les 2013 : petite récolte souvent mal triée, avec des raisins pas sains. Je ne les ais pas (encore) chroniqués, il faudra bien le faire. J’ai fait l’impasse sur 2014, car il y avait un lac à vider en Bretagne : Guerlédan, 300 hectares au-dessus de feu le Canal de Nantes à Brest, et nous avons sorti six livres pour l’occasion. Donc pas du tout du temps de temps pour les primeurs ; c’est bien dommage.

Ma première impression est que ces 2015 sont puissants, avec souvent des finales dures.
Voici quelques premières impressions à Saint-Emilion :
J’ai beaucoup aimé Ripeau : riche et plein, un quelque chose de Pessac.
Le Châtelet : sombre, aux arômes de fruits noirs, bien tannique
La Fleur Morange : bonne vanille, plein et sérieux
Sansonnet : du gras, assez rustique
Fonplégade : bon vin dans un registre bien plus frais
Grand Pontet : curieux nez incisif, de la longueur, dur, prometteur
Destieux : joli vin, clair, une touche de cacao au nez, très long, délicieux
La Dominique : gras, chaud, puissant, fruité, très bon
Cadet Bon : sur la fraîcheur
Ferrand : dur et carré, prometteur

Ensuite, dans l’ordre mais à préciser : Jean Faure, La Marzelle, Balestard, Fombrauge, Dassault, La Couspaude, Soutard, Laroze, Pressac (un caillou !), Grand-Corbin-Despagne, Petit Faurie de Soutard.

Puis Faurie de Souchard, Larmande, Laroque, La Serre, Péby-Faugères, Fonroque, Yon-Figeac (féroce !).

Puis, tous avec quelque chose qui me dérange, Faugères, Clos La Madeleine, Côte de Baleau, La Commanderie, Cap de Mourlin, Fleur Cardinale, Franc Mayne, La Tour Figeac, Clos Saint-Martin, Barde Haut, Haut-Sarpe, Villemaurine, Clos des Jacobins, Corbin, Chauvin.
C’est loin d’être dans l’ordre de la hiérarchie établie. Très bon niveau dans l’ensemble, vins de garde.


A Pomerol, j’ai trouvé dans l’ensemble les vins très durs, amers, avec des finales rèches. On va y repasser pour goûter les plus grands.
Bel-Air est très bon en tout.
Petit-Village, vin complexe, de garde.
Feytit-Clinet est encore bien dur
Rouget, de la chaleur, très vineux, très bon
Vray Croix de Gay, un peu terreux, terrien donc, très bon
Puis Taillefer, Le Gay, Maillet, La Cabanne.

Puis Clos René, Fayat, Les Templiers, La Tribune (le vin des turfistes, que je ne connaissais pas), Le Moulin (bonne note de Quarin, notre bouteille était franchement diluée), La Renaissance.
C’est tout pour aujourd’hui !
Crédit photo: Martine Bleuzen du Pontavice

dimanche, décembre 20, 2015

Résultats de vente à Nantes le 17 décembre 2015

Quelques résultats rapportés à la bouteille sur les premiers crus de cette belle vente.

Comme à l'habitude, je donne des résultats d'adjudication "au marteau" (entre parenthèses, l'estimation basse). Il est facile et courant de donner des résultats frais acheteurs inclus.
Ainsi, si un lot estimé 100 euros est vendu 100 euros, la salle des ventes annonce un résultat de 100+20 euros de frais de vente, soit 120 euros, et peut donc se féliciter d'avoir vendu 20% de plus que l'estimation. Est-ce assez clair?
En tous cas ce n'est pas très honnête.

Cheval-Blanc 2003: 233 (233). Cheval-Blanc 1990/ 525 (450). Cheval-Blanc 1986: 240 (200). Cheval-Blanc 1984: 110 (60).
Haut-Brion 2001: 210 (180). Haut-Brion 1992: 140 (150). Haut-Brion 1990: 400 (333). Haut-Brion 1986: 200 (230). Haut-Brion 1984 ETA: 100 (130).
Lafite 1990: 360 (360). Lafite 1986: 433 (400). Lafite 1981: 200 (150).
Margaux 1997: 235 (130). Margaux 1993: 200 (190). Margaux 1992: 200 (180). Margaux 1991: 200 (180). Margaux 1986 EA: 240 (300).
Mouton-Rothschild 1993 ELA: 240 (200). Mouton-Rothschild 1992: 200 (180). Mouton-Rothschild 1991: 200 (160). Mouton-Rothschild 1987 EA: 166 (158). Mouton-Rothschild 1975 mi-épaule: 150 (120).
Petrus 1987, étiquette déchirée: 850 (600). Petrus 1983, étiquette déchirée: 850 (800). La magie du chiffre 7, symbole de félicité en Chine!
Yquem 1996: 183 (166). Yquem 1985: 216 (200). Yquem 1955 EA et légèrement basse: 400 (500).

Chartreuse blanche à Alençon

- En plus des vieux Armagnac, il peut aussi mettre en vente une vieille Chartreuse. Mais le niveau est bas.
- Pas trop grave. Il y a une grosse demande.
- Je t'envoie une photo.
(...)

- Chartreuse jaune apparemment.Avant 1870.
- Combien ça vaut?
- Vu l'état, je préfère être prudent: entre 1000 et 2000 euros.
(...)

- Et la Chartreuse?
- Il ne l'a pas apportée, il dit qu'elle est en trop mauvais état.
- Faut essayer de la rentrer.
(...)

- Problème: le bouchon n'est pas d'origine, donc elle a été ouverte. Tout ça est très fragile. Je propose de mettre un bouchon neuf.
- (au téléphone) Ne faites pas ça, M. du Pontavice. Ca n'aura plus aucune valeur.
- Je ne prends pas le risque, de vendre une bouteille avec un bouchon de rechange. Je vais acheter un bouchon tronconique, le changer, et mettre un certificat sur le goulot, avec un muselet.
- Personne n'en voudra.
- Alors tant pis.

On a fait comme ça. Le caviste n'a pas voulu me faire payer les deux bouchons que je lui achetais. En reconnaissance, j'ai acheté du Savennières.
Le bouchon était si friable, mangé par l'alcool, qu'il s'est brisé. J'ai, avec les moyens du bord, filtré la bouteille. Je l'ai remplie de nouveau, en gardant 2 centilitres pour expertise, j'ai enfoncé un nouveau bouchon, ciré un muselet de cuivre de fortune, et l'ai collé dans un certificat entourant le goulot, que j'ai signé. Ce n'est pas une réussite esthétique, mais c'est une garantie.

Le liquide était incolore. Or je ne connais pas d'exemple d'une Chartreuse décolorée. Recherches donc. L'ouvrage de référence de Michel Steinmetz est muet sur cette question. Tiens, non: page 33, un encadré sur "les mésaventures de la Chartreuse blanche". On y lit qu'il s'agit d'une cuvée créée en 1860, moins onéreuse et moins complexe; et c'est ce que nous avons trouvé à la dégustation (une grosse pêche, une sucrosité affirmée, sans la complexité des Vertes et Jaunes centenaires que j'ai pu goûter). Cette cuvée a été un échec commercial, et est restée confidentielle.

C'est bien ça. Je peux enfin affiner ma datation: entre 1860 et 1869, et présenter dignement cette rare bouteille avec une estimation de 1000-2000 euros,un prix de départ justifié de 500 euros, et une vente "au marteau" à 5100 euros.
Bon boulot.

Non-buveurs d'étiquettes

Dernière vente publique de l'année, à Nantes. Pour quelques belles caisses de Bordeaux, comme Las-Cases 1982, moins belle que prévue, ou La Fleur-Pétrus 1989, des "courtiers" se sont déplacés.
Courtier n'est pas du tout le terme propre, mais je n'en connais pas d'autres. Ces intermédiaires n'achètent que ce qui est parfait: une étiquette rongée par des vers compromet l'ensemble du lot.
Peu importe que le vin ait été conservé dans une bonne cave humide, c'est l'extérieur de la bouteille qui en fait la valeur. Un niveau moyen et une étiquette parfaite, et le lot vaut plus cher qu'un niveau parfait et une étiquette tachée.

Je me méfie de ces acheteurs qui sont toujours tendus, toujours calculant leur marge à la revente. Au printemps, l'un d'eux a refusé un lot de Lafite 1992 au prétexte qu'il y avait un (petit)trou dans une étiquette. La règle édicte que l'acheteur est responsable de son lot dès l'adjudication. Ce petit trou était postérieur.
Mais cet acheteur ne voulait pas de la règle; il a refusé de payer, il est bien entendu exclu de mes ventes et de celles de quelques autres.

Dans les contrées lointaines où atterrissent ces grandes bouteilles, elles sont en concurrence avec d'autres remplies de je ne sais quoi, mais d'une présentation irréprochable car toutes neuves. Finalement, les étiquettes abîmées nous permettent de conserver ici un peu de grand vin.

Mais en ventes publiques nous ne voyons qu'une part minuscule de ce qui s'échange.
Printemps 2015: un internaute publie sur LaPassionDuVin un post mentionnant un Lafite 1982 avec l'indication "73 cl". Faux!
Rapport du Comité National des Conseillers du Commerce Extérieur de la France (ouf... CNCCEF)au printemps 2015: il y aurait en Chine plus de vins français contrefaits que d'authentiques. Droits de douane élevés, difficulté à obtenir des grands vins en nombre, naïveté des acheteurs expliquent ce marché florissant contre lequel le gouvernement ne peut pas faire grand-chose. Certaines bouteilles ne contiennent pas du tout de raisin!
A l'autre bout du monde, le milliardaire Bill Koch a gagné en septembre un procès en contrefaçon; il s'était fait refiler aux enchères, entre autres, Lafite 1811, Petrus 1921, Latour 1964 (vieux) et 1865 (yes!).
Mais, en juin 2015, la Chine a reconnu l'Indication Géographique Bordeaux, ainsi que celles plus restrictives de la Gironde.
Oui, mais le regretté Henri Jayer n'a sans doute pas produit autant de bouteilles de Cros Parantoux de son vivant qu'il ne s'en vend depuis sa mort. Pour les vieux Bourgogne, l'affaire Ponsot a permis de mettre au jour une fraude industrielle.
Il est vrai que les français n'y sont pour rien, et que les fausses bouteilles circulant en France sont sans doute très rares. Ou alors, à l'ancienne. Dans mes débuts dans le métier, j'ai ainsi vendu des Bourgogne Aligoté qui, selon les acheteurs, avaient goût de Montrachet. Aucun ne s'en est plaint.

Mais récemment encore, j'avais en vente publique deux bouteilles de Mouton-Rothschild 1986 en caisses individuelles. Petit problème à l'ouverture: les bouteilles étaient vides, le bouchon déposé à côté. Les enfants, peut-être.... Ces bouteilles vides, aux étiquettes impeccables, tout le monde voulait les acheter.

Aujourd'hui, sur un très important site de vente en ligne:
Château Lafite Rothschild 2009: sur la photo, pas de millésime sur l'étiquette, mention PAUILLAC sans AOC... et du Latour à partir de 1,75 euro... et aussi du Petrus DRC Conti produit à Bordeanx (sic). Les faussaires chinois ont une prédilection pour le nom de Languedoc, qui orne des étiquettes de Latour ou de Cheval-Blanc.

Je vous souhaite à tous d'excellentes fêtes de fin d'année.
Pour nous au repas de Noël: Yquem 1992, Ausone 1991, Romanée-Conti 1947. (Hélas, trois bouteilles qui n'ont jamais existé.
Quoique j'ai bu du vin du vignoble d'Yquem de 1992, et qu'on m'ait proposé un jour de la Romanée-Conti 1947.)

jeudi, avril 17, 2014

Bordeaux Primeurs 2013 (1)

Je n'ai pas encore fini la rédaction de mes dégustations des 2013. Comme on s'en doute, ce n'était pas facile, d'autant que par un coup de tête j'avais décidé de consacrer une bonne partie de mon temps aux vins du Bas-Médoc. J'y reviendrai donc dès que possible. Pendant des années j'ai publié sur VinorumCodex.com les tarifs des vins primeurs. C'était un gros travail de documentation destiné à mes abonnés. Aujourd'hui des dizaines de sites les donnent gratuitement, je n'y vois donc plus grand intérêt.
Il est clair que 2013 n'est pas un bon millésime, à l'exception des délicieux liquoreux. Cependant, les Pomerol de moyenne gamme que j'ai goûtés étaient plutôt bien, les Pessac pas mal, Saint-Julien aussi, Médoc très inégal. Quant aux Saint-Emilion, je n'ai pu en goûter que très peu. Les argiles du secteur Cheval-Banc-Figeac ont protégé les vins, ceux de Saint-Emilion-même m'ont semblé surextraits selon la vieille habitude.
Côté prix, la dégringolade annoncé n'est pas encore au rendez-vous. Lors des dégustations, on ne parlait que de Pontet-Canet, marque aujourd'hui de référence, qui a sorti, et semble-t-il vendu rapidement, son 2013 au prix (pas donné) du 2012: 60 euros HT, 67,50 pour l'acheteur. Soit le prix d'un second cru, récompense de la grande qualité.
C'est parfois la débandade: Duhart-Milon à 55 euros, c'est plus de deux fois moins cher que le 2010, mais c'est compréhensible. Idem pour Lynch-Bages qui devient une affaire tentable. Mais je doute qu'à 300 euros les premiers crus aient beaucoup d'amateurs. Les bébés de l'an dernier auront peu de chance de boire pour leur mariage des Bordeaux rouges encore en forme. A Saint-Emilion, Bellevue me semble une affaire correcte. Pomerol ne devrait pas beaucoup baisser, vu sa réussite indéniable dans ce millésime. En Médoc, je proposerai en primeur Belle-Vue, bon et pas cher. Autre jolie bouteille: Charmail.
Il y a de jolis vins dans les Graves. On y revient toujours.

jeudi, mars 20, 2014

Crimée: le trésor méconnu de Massandra

Ballottée entre l'Ukraine et la Russie, la presqu'île de Crimée recèle pas mal de trésors... gaz, hydrocarbures... ce n'est pas mon domaine. Mais il existe en Crimée un trésor peu connu mais essentiel, qui est la cave de Massandra.
Un peu d’histoire d’abord : la culture de la vigne est très ancienne en Crimée, essentiellement sur la côte sud. Les grecs y ont fait du vin du temps de leur splendeur. Dans sa topographie de tous les vignobles connus (édition de 1866), Jullien cite des vignes indigènes et assure qu’on pourrait y faire du bon vin si on s’en donnait la peine. Or, au 18° siècle, le tsar Pierre Le Grand soignait son ulcère au vin de Cahors, le Kaorskoie vino, et l’église orthodoxe l’utilisait comme vin de messe. Avec la détermination des très-puissants, le tsar fit venir de Cahors des vignerons avec leurs familles, des plants, des barriques, bref il implanta au sud de la Russie un vignoble cadurcien. Puis le vignoble de Crimée se développa en copiant tout ce qui pouvait l’être : porto, madère, champagne, bordeaux, bourgogne… Dans son ouvrage 100 bouteilles extraordinaires de la plus belle cave du monde, auquel j’ai collaboré, publié chez Glénat, le collectionneur Michel Chasseuil, grand ami de Massandra, a fait la part belle aux vins de Massandra, dont la plus ancienne bouteille est de 1775 :
Muscat 1945 (nous reviendrons sur ce millésime).
Muscat 1934.
Cagore 1933. A base du cépage saperavi, c’est l’imitation du fameux vin noir autrefois produit à Cahors par chauffage des moûts, et récemment remis à l’honneur en France.
Muscat 1924.
Lacrima Christi 1897. Un vin liquoreux de grande classe, qui usurpe un nom célèbre… que se distaient déjà l’Italie (Vésuve) et l’Espagne (Malaga). Porto 1891.
The Honey of Altea Pastures 1886, un vin inventé par le prince Golitzin, et fortifié au miel.
Muscat de Lunel 1948, produit à partir du muscat à petits grains, connu à Lunel en France, mais originaire de Grèce.
Madère 1837.
On le voit, Massandra ne s’embarrassait pas des Appellation, contrôlées ou non. On trouve encore dans cette cave des tokays, des portos, des rieslings, des pedro ximenez, des sherries…
Massandra, ce sont depuis Nicolas II et le prince œnologue Golitzin, soit depuis 1894, sept tunnels parallèles de 150 mètres de long. Mais le plus intéressant est à venir, autour de deux dates dramatiques : 1945 et 1941.
En février 1945, du 4 au 11, Churchill, Roosevelt et Staline réglèrent en secret la face du monde d’après la guerre dans le palais impérial de Livadia, résidence de Staline. Faute de place, les phrases suivantes n’ont pas été retenues dans le livre :
« De Gaulle n’avait pas été invité, malgré la demande de Churchill. On sait que Roosevelt, qui mourrait deux mois plus tard, était très affaibli ; quant à son conseiller, Hopkins, ravagé par un cancer, on le portait sur une civière. Au cours de la conférence, on mangea, dit-on, trois wagons de cavier, et on but à satiété du Bourgogne et du Champagne de Crimée. Ces étiquettes contrefaites, c’était la place de la France. Et Roosevelt au moment des adieux, déclara en souriant à Staline que quand il ne serait plus président des Etats-Unis, il s’établirait représentant en Champagne du Caucase ! Amère conclusion… » Un président affaibli, un premier ministre abondamment abreuvé de bons vins, et un Staline resplendissant de santé, voilà le trio des vainqueurs, et on en connaît le résultat terrible.
Il faut dire que les vins de Massandra revenaient de loin, plus précisément d’au-delà de l’Oural : en 1941, devant l’avance des allemands, Staline avait réquisitionné des wagons pour évacuer les trésors de la cave de Massandra, un million de bouteilles, abandonnant en échange aux envahisseurs les blessés de l’Armée Rouge. Ce sont ces grands vins, de retour en Crimée, qui aidèrent Staline dans son triomphe de Yalta. On voit que les tsars de Russie, quelque soit leur dénomination, ont toujours eu le plus grand intérêt pour ce trésor national !
Aujourd’hui le vignoble de Crimée couvre plus de 30.000 hectares. On y cultive tous les cépages du monde, on y produit 50 vins liquoreux différents ! Qui l’emportera ? Il est trop tard, semble-t-il, pour refaire le coup de wagons.

dimanche, décembre 15, 2013

La cave en Or de Matignon d'Argent

La cave en Or de Matignon d'Argent* "La vente aux enchères d'une partie de la cave de Matignon, qui s'est déroulée à l'Hôtel Drouot vendredi 6 décembre, a rapporté plus de 173 000 euros, alors que l'estimation était faite à 100 000 euros. Parmi les acquisitions, un Romanée-Conti* de 2004 a été acquis par un acheteur chinois pour 10 500 euros. Un lot de 12 bouteilles de Mouton-Rothschild 2000 a également été vendu, pour 14870 euros." Je lis cela sur le site de... 1855.com! Peu importe la source tant qu'elle n'est pas tarie. Quant à la vente, elle a été opérée par Maître Pierre Cornette de Saint-Cyr. Je l'ai rencontré, un jour. A chaque fois qu'une mairie, qu'un ministère ou qu'un palais vend du vin acheté avec nos sous, s'élèvent des protestations quant au dilapidement, voire la dilapidation de notre patrimoine, qui en tous cas fout le camp à l'étranger. Je ne suis pas d'accord. Je trouve ça très bien. Si on peut vendre du Château Siaurac 1986, honnête Lalande-de-Pomerol produit d'une famille de ministre au prix exorbitant de 50 euros la bouteille, c'est tout bénéfice pour la République. Depuis longtemps je conseille une importante institution européenne en ce qui concerne sa cave, qui est conséquente. Cette cave est gérée "en bon père de famille" avec des achats en primeurs, un long vieillissement en bouteilles, et une consommation à maturité. Ca fonctionne, c'est européen, mais c'est peut-être vieu jeu. Une fois que je leur suggérais de revendre des vins qui avaint acquis une certaine plus-value, afin d'en racheter de plus jeunes, ils ont haussé les sourcils et les épaules. Une démarche moderne prenant en compte le marketing est peut-être celle choisie par nos élites: mettre en vente de grands vins ayant séjourné dans les caves de nos palais, dûment authentifiés, les vendre un max en jouant sur la vanité des acheteurs ( comme ce chinois qui s'est offert croit-il un petit bout de l'Etat français en achetant une Romanée-Conti 2004 au double de sa valeur), et si la gestion est bonne racheter des vins avec cette plus-value. Car il faut séparer l'effet d'annonce du résultat: vendre quelques grands crus pour montrer que l'Etat est modeste, c'est idiot: le résultat est dérisoire, l'Etat n'en est pas plus modeste. Les vendre à des vaniteux, qu'ils soient chinois, russes ou français, pour faire une plus-value, c'est de la bonne gestion. Il suffit ensuite de racheter les mêmes vins sur le marché à moins cher et de recommencer, mais pas trop souvent. Le principal investissement est l'achat des autocollants certifiant sans indication de durée que ces vins ont séjourné au Palais de L'Elysée, à Matignon, à la mairie de Paris, ou autre (sachant que la plus-value du sticker est très variable selon le prestige du lieu de détention. En effet, si le maire de ma commune de 160 habitants mettait en vente la cave que de toutes façons nous n'avons pas, je doute que l'opération soit bénéficiaire. Profitons donc sans vergogne de la vanité et de l'ignorance des riches pour leur fourguer les bouteilles bonnes ou mauvaises et augmenter notre capital. En tant qu'expert, je suis bien sûr tout disposé à participer à ce genre d'opérations. * Personnellement, j'aurais plutôt écrit "une Romanée-Conti". http://vinorumcodex.blogspot.fr/2009_12_01_archive.html

mardi, décembre 10, 2013

Ventes publiques à Alençon et Nantes

Classique vente d'automne à Alençon. Une belle cave de château des Pays de la Loire, des bouteilles de très bon niveau, de belles étiquettes, mais plus de caisses bois. Ca dérange les revendeurs, mais c'est comme ça. On vend Lafite 1992 à 375 euros marteau, ce qui est très cher pour les cours actuels. Sans doute la garantie d'une origine certifiée... Petrus 1972 en état médiocre part à 580 euros, alors qu'une bouteille de 1989 en excellent état atteint 2.050 euros, ce qui est bien. La Tour de Mons 1982, une jolie bouteille de Soussans, ne dépasse pas 12 euros, car les bouteilles n'ont plus d'étiquettes. Les demandes sur la forme sont aujourd'hui plus importantes que celles sur le fond. Les acheteurs acceptent des niveaux moyens, pourvu que les étiquettes soient impeccables. Je refuse toujours, exception faite de Mouton, de décoter des bouteilles bien conservées avec des étiquettes tachées. Le vin est une denrée comestible, tout d'abord. La semaine suivante, vente de Noël à Nantes. Dans un lot de petits vins, j'avais trié quelques jolies bouteilles, dont un Champagne Salon de 1971 de bon niveau. Il s'est vendu 400 euros, loin derrière le magnum du millésime qu'on y avait vendu 2000 euros il y a trois ans. Mais ce n'est pas trop mal. Des dizaines de bouteilles de whiskies feront de bons réveillon. Un Clos des Lambrays 1951, de niveau moyen, atteint 120 euros. Pas cher. Yquem 1988 se vend à son juste prix: 200 euros, bien moins cher que les cotes surgonflées des millésimes récents. Rayne-Vigneau 1947, tout haut d'épaule, était une affaire à 150 euros. Mouton 1990 bloque à 210 euros, pas plus cher que le 2002. La culture des vieux millésimes se perd. Latour 1989 à 255 euros est à son prix, Lafite 1989 aussi à 375 euros. A 325 euros, l'excellent Haut-Brion 1990 est correctement vendu.Palmer 1990 ne dépasse pas 100 euros, mais ce n'est pas une marque facile à vendre au-delà des primeurs. Comme d'ailleurs Las-Cases: les "super-seconds" se vendent comme de seconds. Ce n'est pas le cas de Lynch-Bages, tellement populaire et demandé: 180 euros pour le 1989 à Alençon, 30 euros ici pour le 1997. Duhart-Milon est scotché par la spéculation de l'an dernier. On finit sur de beaux Sauternes en hors catalogue, des cadeaux: Rieussec 1943 à 150 euros, Doisy-Védrines 1948 (pas une si mauvaise année) à 50 euros, et, en fin de course, Sociando-Mallet 2006 à 16 euros. Prochaiment; des ventes le 14 décembre à Mayenne et le 21 décembre à Châtellerault. Puis relâche. Je viens de coter un très beau lot de vieux vins de Bordeaux qui sera -peut-être- à vendre cet hiver en Normandie.

vendredi, juillet 19, 2013

Pierre-Bise & La Tour Blanche & Le Tour de France

Samedi 20 juillet 2013 à Bayeux, dans deux jours, une vente aux enchères. Parmi les différentes caves de particuliers que j'ai à présenter, l'une d'elles m'a semblé particulièrement intéressante quand je suis venu voir les lots. Il y avait un peu de tout, du grand comme du petit, dans des présentations médiocres: étiquettes souvent très abîmées - mais des niveaux plutôt bons. Je repère environ 180 bouteilles du Château Pierre-Bise, plus en blanc (Anjou le Haut de La Garde) qu'en rouge (avec même quelques bouteilles non millésimées que je suppose dater des débuts de Claude Papin). Pas facile à cataloguer, car il manque souvent les millésimes, parfois toutes les étiquettes. Je classe donc ça comme je peux, sachant qu'il y a les millésimes 1988, 1990, 1991, 1992, 1993, 1994, 2000, au moins. Reste à savoir ce que valent les vins. J'ai donc goûté avec quelques dégustateurs familiers de Pierre-Bise le rouge en 1990 et 2000. 2000 a une belle robe encore jeune; le nez est marqué de cabernet, franc! sans aucune trace de vieillissement. Le vin est fondu, équilibré,très velouté avec des tannins doux. C'est facile, coulant, très agréable. Quatre heures après, le nez s'est un peu estompé, mais le vin a toujours la même chair veloutée. L'Anjou Pierre-Bise 1990 est plus évolué à l'oeil, avec un peu mons de gras visible. Le nez est moins marqué par le cépage, mais plus complexe, fruité, avec un léger goût de champignonnière. En bouche, le vin est excellent, construit, équilibré, de longueur moyenne néanmoins. C'est un très bon Anjou dans un grand millésime. D'un lot de bouteilles bourguignonnes sans étiquettes, venues d'un autre vendeur, nous en goûtons une prise au hasard. Ca évoque la terrible descente du col de La Sarenne au Tour de France cet après-midi.Out! Ensuite, une fillette sans étiquette et fermée à la cire, d'un autre lot. Le liquide est trouble et marronnasse... Dès la carafe, ça sent la truffe à plein nez. On attend que le vin se décante, mais ça ne semble pas être du vin. Ensuite, un nez net d'abricot! En bouche, quelque chose d'un peu sucré, qui n'est sûrement pas du vin. On suppose qu'il s'agit d'une liqueur maison. Très étonnant, sans doute assez vieux. Enfin, un Sauternes dont il ne reste que les deux tiers (et je suis large). Il y en avait quatre bouteilles, j'ai choisi de goûter la plus basse pour avoir un aperçu. Le vin est orangé et un peu trouble, bien qu'il n'y ait pas de dépôt dans la bouteille. Il a conservé du brillant, ce qui est bon signe. Le nez est classiquement Sauternes, mûr mais pas confit, même un peu dur. La bouche est similaire, plus longue que large, attaque fine, corps équilibré, finale étroite, un peu comme Froome dans l'Alpe d'Huez cet après-midi. Sans avoir l'opulence d'un grand Sauternes, c'est franchement très bon, surtout pour une bouteille en aussi médiocre état. Le vin, c'est La Tour Blanche, et le millésime c'est 1938, une année que je ne connais pas. Je sais qu'elle n'a pas grande réputation, mais il faut vérifier: elle suit 1937 exceptionnel, et souvent le cadet d'un grand millésime est injustement décrié. Peut-être un Contador? Je commence par vérifier chez moi, sur Vinorumcodex. Le seul Sauternes auquel je donne une note est Yquem, et elle est médiocre. Richard Olney ne commente pas Yquem 1938, ce qui est une des exceptions dans son ouvrage sur Yquem. Broadbent parle d'un millésime moyen, où pourtant il a bien goûté, dans les années 1970, Rieussec et Lafaurie-Peyraguey. Mon La Tour Blanche 1938 mérite bien une bonne note, et je dirai du bien lors de la vente des autres bouteilles qui sont en bien meilleur état. De la même cave, j'ai extrait, mélangées à de petits vins, quelques bouteilles de Climens 1940 Dans ce lot insolite, il y a aussi deux bouteilles dont je n'ai jamais entendu parler. Je pense qu'elles datent des années 1950. Il s'agit de "blanc de blancs" du Château Saint-Georges, propriété emblématique de Saint-Georges-Saint-Emilion. Mais c'est du vin pour vendre, pas pour goûter!

samedi, mai 25, 2013

22 millésimes de Mac Carthy


Une verticale inédite: 22 millésimes du Château Mac Carthy à Saint-Estèphe. Ce petit frère du grand Haut-Marbuzet nous a bien surpris. Cliquez sur le titre pour voir les résultats.

jeudi, mai 23, 2013

Primeurs 2012, mon tarif

Je viens de publier mon tarif primeurs des Bordeaux 2012. Comme je l'ai déjà écrit, le millésime est très hétérogène. Je me suis adossé à Dubecq, une maison de confiance, et sur les centaines de références qu'ils proposent, j'ai fait une sélection drastique de 35 vins, soit 10% de ce que j'ai goûté. Bien sûr, je peux vous en obtenir d'autres, mais je n'avais cette année envie de vendre que ce que j'ai bien aimé, dans mon goût plutôt classique: pas trop d'alcool, une attention pour l'élégance apportée par les cépages d'appoint: du cabernet-franc avec le merlot, du petit-verdot avec le cabernet-sauvignon, un peu de malbec au nord... bref cet assemblage qui fait la finesse du vignoble de Bordeaux. Tout ça est disponible sur VinorumCodex en cliquant sur le titre du post.

mercredi, mai 08, 2013

Bordeaux Primeurs 2012: 340 vins commentés

Comme chaque année, en avril 2013 j'ai parcouru les vignobles de Bordeaux pour avoir un aperçu de 2012. Le millésime est très hétérogène, mais en triant il y a de fort jolis vins. Mon rapport complet est publié sur www.Vinorumcodex.com , lien "Primeurs 2012". Comme d'habitude, les descriptions des vins sont concises, car elles sont le prélude à celles de Vinorum qui ne comportent qu'une courte phrase. Mais les vins sont classés par ordre croissant de préférence dans chaque section. Bleuzen du Pontavice a soigné les photos; vous trouverez bien sûr quelque part dans ce rapport la signification de ces logos, qui figurent réellement sur des étiquettes de vins de Bordeaux. Bonne lecture. Je ferai cette année une offre en primeur, car je trouve qu'il y a de très bons rapports qualité-prix. Cela viendra bientôt, et je suis pas plus cher qu'un autre, parfois même moins. Gilles du Pontavice, expert en vins.

Les primeurs 2012, c'est en alexandrins

Ce sonnet fabriqué à l’élisabéthaine
Présente mon retour au monde des primeurs.
Ces vins qui sont « pas mal » pour Desseauve et Bettane
Offriront du plaisir – peut-être du bonheur ?

Les vins de demi-garde, produits en deux-mil’douze
N’iront pas la plupart en cave chez Chasseuil
Ni dans les winedinners de François Audouze.
On ne peut cependant se les offrir à l’œil.

Cabernets ou merlots, petits verdots, malbecs,
Ceux que j’aurai choisis, sincères, vifs et aimables,
Elevés au château puis livrés par Dubecq,
Devraient faire assez vite bons compagnons de table.

Comme au dix-neuvième l’érudit Biarnez
Avait classé les vins en vers interminables,
Je vendrai mes primeurs, de Belle-Vue à Pez
En ne proposant que ce qui sera buvable.

Je ne versifierai que ce que j’ai goûté,
Je ne versifierai que ce que j’ai craché.

lundi, avril 22, 2013

La dure réalité de la vie d'expert en vins

La dure réalité de la vie d’expert en vins… quand on se permet quelques jours de vacances à Noël

Autour d’une vente publique fin 2012

PREMIERE PARTIE : AVANT LA VENTE

De : Gilles du Pontavice [mailto:gilles.dupontavice@orange.fr] Envoyé : lundi 21 mai 2012 10:08
Cher Monsieur, veuillez trouver ci-joint l'estimation pour la liste que vous avez confiée à Talma Enchères, pour un total de 680 à 844 euros. Avec mes sentiments dévoués, Gilles du Pontavice
Mail du vendeur
Cher Monsieur, bonjour. Merci pour votre réponse. Il me reste à voir avec la salle des ventes Talma leur programmation. Bien cordialement
De : Gilles du Pontavice [mailto:gilles.dupontavice@wanadoo.fr] Envoyé : lundi 3 décembre 2012 18:19
Cher Monsieur, oui, nous avons une vente programmée le samedi 15 décembre prochain. Est-ce que je dois y inclure la liste que vous nous avez confiée au printemps? Avec mes sentiments dévoués,
Mail du vendeur
Bonsoir. Oui je veux bien si cela vous est encore possible ! Je revois demain cette liste pour vous confirmer la disponibilité effective des bouteilles proposées ! Bien cordialement
De : Gilles du Pontavice [mailto:gilles.dupontavice@wanadoo.fr] Envoyé : mercredi 5 décembre 2012 15:09
Bonjour Monsieur, c'est noté et j'inscris vos vins au catalogue de la vente du 15 décembre. Bien à vous
Mail du vendeur Sent: Wednesday, December 05, 2012 5:07 PM
Ok merci . Bien noté. Avez-vous fixé les prix de réserve ? Merci. Cordialement
De : Gilles du Pontavice [mailto:gilles.dupontavice@wanadoo.fr] Envoyé : mercredi 5 décembre 2012 17:40
Cher Monsieur, le prix de réserve est légalement le bas de la fourchette d'estimation; sauf bien sûr si un vendeur accepte de vendre à un prix inférieur. Vu l'importance de la vente et la qualité de vos vins, Bordeaux prêts à boire pour la plupart, je ne suis pas inquiet. Je peux gérer en cours de vente un prix de réserve global pour l'ensemble du lot, si vous m'y autorisez. Bien à vous,
Mail du vendeur
Why Not ?? Ok plus simple que bouteille par bouteille
De : Gilles du Pontavice [mailto:gilles.dupontavice@wanadoo.fr] Envoyé : samedi 8 décembre 2012 18:35 Cher Monsieur, l'idéal est de déposer vos lots entre lundi et mercredi à Talma-Enchères . Je vous redonne les estimations ci-dessous. Bien à vous, Gilles du Pontavice
Mail du vendeur
Bonjour . Je vous prie de bien vouloir trouver joint le fichier de la liste définitive proposée pour la vente du 15 décembre prochain. J’ai retiré les vins de millésimes postérieurs à 2005 ils sont encore à se faire et se valoriser pour plus tard !). Merci de me proposer un prix de réserve acceptable pour les flacons de la liste ! Et me dire quand je dois les déposer à la salle des ventes Talma. Bien cordialement
Mail du vendeur
Liste complétée pour les appellations qui manquaient sur la liste de ce matin
Mail du vendeur
Re bonsoir. Je voulais vous dire que ce n’est pas cette liste qui est mise en vente. Je vous ai envoyé la liste il ya plusieurs jours et ce n’est pas celle là !!!. Vérifiez bien vos mails. Ok pour déposer les bouteilles dès début de semaine
Mail du vendeur
Je vous envoie une nouvelle fois la liste….la bonne
Mail du vendeur (bis)
Je vous envoie une nouvelle fois la liste….la bonne
Mail du vendeur
Bonjour Maîtres. Ok je déposerai les caisses d’ici jeudi mais dites-moi à quelle heure cela convient-il le mieux. L’estimation que vous donnez ci-dessus est pour la liste définitive que j’ai communiquée à Mr du Pontavice que j’ai eu au fil ce matin.. Il m’a confirmé que le changement avait été fait et qu’il s’agissait bien de la liste dont je joins le fichier. Bien cordialement

SECONDE PARTIE : APRES LA VENTE

Mail du vendeur le 26 décembre 2012 à 18H13

Bonjour Maître. Après pointage ce jour, avec votre collaborateur, sur la vente de vins de samedi dernier il ressort que sur les 26 bouteilles que j’ai déposées 3 ne figurent pas au compte rendu de la vente (procès verbal) . A savoir 1 Talbot St Julien 1 Baronnât Rothschild 1985 1 Domaine de Verquière / Vacqueyras 2002 Dans l’attente de votre commentaire et explication sur ces manques !! Bien cordialement
Mail du vendeur le 28 décembre 2012 à 21H15
Bonsoir. Je suis surpris de n’avoir aucun accusé de réception de mes mails vous demandant explications faisant suite à la vente des vins du samedi 15 décembre 2012. Dans l’attente. Cordialement
Mail du vendeur
Bonjour. Merci de me donner la réponse suite à notre entretien d’hier ; Je vous signale que Mr du Pontavice m’a donné un prix de réserve sur la liste des 26 bouteilles qu’il a examinée, et pour lequel j’ai dit OK, et que ce sont bien les 26 bouteilles que j’ai déposées entre les mains de D. Pour m’assurer que je n’étais pas fou j’ai passé en revue ma cave de fond en comble et les 3 bouteilles manquantes, comme je vous le disais n’y sont pas car elles étaient le jeudi précédent la vente dans les 26 déposées rue Talma Donc je vous demande de bien vouloir me créditer de la fourchette basse du prix de réserve : 670 euros moins les frais de 17,940% soit 670-120 = 550 euros Dans l’attente , bien cordialement
Mail du vendeur Envoyé : mardi 8 janvier 2013 13:28 Objet : BONJOUR Importance : Haute
Bonjour et meilleur vœux. Merci de ne pas oublier de me donner réponse concernant la vente des vins et le problème évoqué que vous connaissez. Pour mémoire le prix de réserve donné par l’expert est de 670 euros Cordialement
Mail du vendeur le 8 janvier 2013 à 14H28
Bonjour et meilleur vœux. Merci de ne pas oublier de me donner réponse concernant la vente des vins et le problème évoqué que vous connaissez. Pour mémoire le prix de réserve donné par l’expert est de 670 euros Cordialement
Mail du vendeur le 8 janvier 2013 à 16H22
Je me doute bien que je suis loin d’être votre préoccupation première, toutefois je serais heureux de ne pas rester éternellement sans réponse. Avec mes remerciements anticipés. Cordialement
Mail du vendeur Sent: Wednesday, January 09, 2013 11:04 AM Subject: PRECISIONS
Les 26 bouteilles déposées avec l’aide de D. étaient conditionnées en 4 caisses bois de 6 bouteilles et un carton de 2 bouteilles. Je lui ai donné en mains propres la liste et il a vu les 26 bouteilles
De : Gilles du Pontavice [mailto:gilles.dupontavice@wanadoo.fr] Envoyé : dimanche 13 janvier 2013 17:46
Cher Monsieur, ayant fait le point avec Talma-Enchères, je réponds à votre courrier. Pardonnez-moi ce retard, mais j'étais en déplacement. Il n'y a pas de problème, nous avons bien reçu les 26 bouteilles de votre liste. Le Vacqueyras et le Médoc Baronat ont été vendus en lot, vous les retrouverez sur votre décompte vendeur sous le numéro 36. La bouteille de Château Talbot n'a pas été vendue, elle est dans la réserve de l'hôtel des ventes. En ce qui concerne le prix de vente, l'estimation basse pour les 25 bouteilles vendues était de 430 euros et la vente a été de 505 euros. Avec mes sentiments dévoués, Gilles du Pontavice
Mail du vendeur Date lun. 14/01/2013 09:58 (GMT +01:00) À : "Gilles du Pontavice" Objet : RE:PRECISIONS
Bonjour. A la lecture de votre mail j’avoue ne plus bien comprendre et savoir qui dit juste ! Les chiffres d’un moment à un autre ne sont pas en concordance ! Nantes Enchères Talma m’a dit par écrit que le prix de réserve était de 670 / voir mail du 10/12 2012 ( estimation 670/815) Vous me dites ce soir que l’estimation basse était de 430 euros !!! chiffre que je découvre pour la première fois car les estimations étaient de 670/815 comme décrit dans le mail du 10. D’où vient ce chiffre de 430 pour 25 bouteilles ? Tout cela n’est pas très clair ! C’est le moins que l’on puisse dire. C’est la première fois que je teste Nantes Enchères Talma en mettant quelques bouteilles de ma cave, mais je vous avoue ne pas avoir été (et je ne suis pas le seul vendeur qui le pense) convaincu par le déroulement de cette vente ! Comparativement à d’autres expériences antérieures toujours pour des vins. Bref j’espère que NET trouvera la solution Ad Hoc pour rétablir la situation de façon équitable. Dans l’attente. Bien cordialement à vous PS je transfère le mail du 5 12 dans lequel vous dites « ne pas être inquiet » et pouvoir compte tenu de la qualité des vins proposés « gérer un prix de réserve global » pour le lot !!!
De : Gilles du Pontavice [mailto:gilles.dupontavice@wanadoo.fr] Sent: Monday, January 14, 2013 4:21 PM Subject: TR :RE:PRECISIONS
Bonsoir Cher Monsieur, la situation est claire je le crois: mon estimation de 670 euros valait pour les 50 bouteilles de votre liste, or vous en avez déposé la moitié. Je ne peux malheureusement vendre que les bouteilles qu'on m'a apportées. Les autres sont restées en votre possession. Le prix de vente global s'établit à 20% au-dessus du prix de réserve. Ce n'est pas trop mal. J'estime donc que nous avons rempli notre mission. Je suis à votre disposition pour tous autres renseignements. Avec mes sentiments dévoués, Gilles du Pontavice
De : "Gilles du Pontavice" Date lun. 14/01/2013 21:48 (GMT +01:00) À : "Nantes encheres TALMA
Il est fou. Il demande qu'on respecte un prix de réserve sur 50 bouteilles alors qu'il n'en a déposé que la moitié, la ficelle est grosse. On a une estimation que j'ai faite pour 670 euros concernant 50 bouteilles. On a une réquisition sur les 26 bouteilles déposées, estim. basse à 400 euros. On a un relevé de vente à 500 euros, moins une bouteille de Talbot non vendue. On a fait notre boulot. On n'a rien à se reprocher. Il cherche à établir une confusion entre l'estimation que j'ai faite de sa liste et le prix de vente de ce qu'il a déposé, soit la moitié de la liste. Ci-dessous ma réponse. Il n'y a rien à céder! Bonne année et bons vendeurs et amitiés! Gilles
Mail du Commissaire-Priseur
Merci Gilles de t'être penché sur ce cas qui relève davantage de la psychatrie, je te l'accorde. A mon tour de te souhaiter une belle année 2013 à toi et à ceux qui te sont chers.
Mail du vendeur
Monsieur bonjour. Bien ! Puisque vous estimez avoir rempli votre mission, je ne ferai pas de polémique. Je ne dirai qu’une chose c’est que l’information manque parfois de précision entre vous NET et les clients (Manquent 3 bouteilles….puis 2/3 vendues en lot…puis une demeurée en réserve !) Bref je demande maintenant à NET de bien vouloir m’adresser le chèque du montant qui me revient, et la bouteille de TALBOT qui est restée sur le carreau ! Cordialement

FIN DE LA SECONDE ET DERNIERE PARTIE

lundi, mars 25, 2013

Romanée-Conti et DRC, 69 bouteilles


Le 4 avril avait lieu à Brest une belle vente comprenant notamment des assortiments du domaine de la Romanée-Conti de 2001 à 2009. Voici les prix d’adjudication de cette vente très disputée :
Romanée-Conti 2001 : 5500 euros, 2002 : 6400, 2003 : 6700, 2004 : 5300, 2005 : 8100, 2006 : 5500, 2007 : 5400, 2009 : 7600.
La Tâche 2001 : 850, 2002 : 1100, 1020, 2003 : 1250, 2004 : 720, 2005 : 2000, 1900, 2006 : 980, 2007 : 750, 2008 : 1080, 2009 : 1640.
Romanée-Saint-Vivant 2001 : 450, 2002 : 440, 2003 : 520, 2004 : 320, 2005 : 800, 2007 : 450, 2008 : 580, 2009 : 710.
Richebourg 2001 : 580, 550, 2002 : 670, 2003 : 750, 2005 : 1000, 2007 : 540, 2008 : 620, 2009 : 1070.
Grands Echezeaux 2001 : 500, 2002 : 420, 2003 : 570, 2004 : 400, 2005 : 600, 2006 : 400, 2007 : 420, 2009 : 560.
Echezeaux 2001 : 340, 2002 : 390, 2003 : 420, 2004 : 300, 2005 : 550, 2007 : 350, 2008 : 400, 2009 : 480.

mercredi, décembre 05, 2012

Renouveau du vin breton

Samedi, la salle Yves-Bleunven du Folgoët (Finistère) accueillait l'asssemblée générale de l'association Du Renouveau des vins bretons. Cette association rassemble une centaine de viticulteurs amateurs, qui peuvent ainsi échanger sur les techniques de production et de vinification, afin d'améliorer les rendements et la qualité du vin. Car, aujourd'hui, les résultats obtenus par les vignerons bretons sont souvent aléatoires. La production bretonne n'est pas uniforme : elle dépend des cépages, des modes de production, du climat, des sols, de l'exposition, de la vinification non encore parfaitement maîtrisée. Selon Pierre Guigui, membre-fondateur de l'association, dégustateur chez Gault et Millau, « les vins bretons expriment bien souvent de la fraîcheur avec des matières plutôt légères et aériennes ». Quelques vignes ont été sélectionnées : celles de Jean Donnio, près de Loudéac ; de Jacques Jézéquel, à Lanarvily ; de Roger Abgrall, à Daoulas ; le Clos Joly-Marthe, à Morlaix ; les côteaux du Braden à Quimper, celle du Coglais du pays de Fougères. Une dégustation des vins produits par les membres de l'association a eu lieu. L'occasion pour Gilles du Pontavice, membre-fondateur de l'ARVB, critique oenologue, de prodiguer des conseils à chacun d'entre eux. (Ouest-France)

mercredi, novembre 14, 2012

Petrus 1947

2 bouteilles de Petrus 1947, c'est rare et très recherché. Pas de chance, elles n'ont plus d'étiquetes. La capsule est bonne, avec la mention de mise au château. Je regarde les bouchons: la mention "1er des grands crus" signale bien du Petrus. Le pedigree est bon, d'un ancien restaurant de Bretagne. Alors, le millésime? Eh bien, me dit le vendeur, quand il en a hérité, il y avait des lambeaux d'étiquettes avec ce millésime. Il est de bonne foi, car il ne connaît pas la qualité de 1947. Pas d'autre solution que de les passer en vente à prix peu élevé, et avec un ce
rtificat signé résumant ce que j'en sais. Ce sera le 15 décembre 2012 à Nantes, Talma-Enchères, et on verra bien qui osera risquer le coup.

jeudi, octobre 18, 2012

Cuvée des Célestins 1959

Il me dit "j'ai quelques bouteilles très vieilles venant de mon père. Il achetait directement aux domaines". Lambeaux d'étiquettes, bouchons neutres, un travail d'expert pour retrouver le millésime. Et je tombe sur la Réserve des Célestins du père d'Henri Bonneau, sans doute de 1959, un très grand millésime à Châteauneuf-du-Pape comme partout ailleurs. Le domaine Henri Bonneau est avec le Château Rayas le plus renommé de Châteauneuf-du-Pape. La Réserve des Célestins était étiquetée "Cuvée" du temps de Marcel, son père, et précédemment "Clos". Robert Parker lui attribue cinq étoiles: "S'il fallait définir la quintessence du Châteauneuf-du-Pape, ce ne pourrait être que la Réserve des Célestins d'Henri Bonneau (...). Les vins de ce producteur sont encore presque immortels en termes de potentiel de garde (...). Je ferais n'importe quoi pour pouvoir déguster les 1967, 1961, 1959 ou 1957 d'Henri Bonneau." Michel Dovaz lui donne cinq verres: "La Réserve des Célestins est un Châteauneuf-du-Pape somptueux, grenat foncé, dont la qualité essentielle, tant au nez qu'en bouche, est l'harmonie". Dans 100 bouteilles extraordinaires de la plus belle cave du monde, Michel Chasseuil, qui possède dix millésimes du domaine, fait figurer une bouteille de 1942 dont il dit qu'il "exhalait des parfums complexes de roses famées, de truffe, d'épices fumées, de sous-bois. La robe était à peine tuilée, lumineuse, limpide, étonnament jeune."
C'est en vente en ce moment sur VinorumCodex, ça ne durera pas longtemps.

mercredi, octobre 17, 2012

100 bouteilles extraordinaires

Après le français, l'anglais, le néerlandais, l'allemand, l'italien, le portugais, l'ouvrage 100 bouteilles extraordinaires de la plus belle cave du monde, sélection de la cave de Michel Chasseuil (meilleur livre au monde sur le vin en 2011)
, auquel j'ai collaboré, vient de sortir en chinois. La couverture en est un dessin du château de Chambord. Après réflexion, la couverture est un dessin où des silhouettes de bouteilles surmontent les toits de Chambord "où un village semble camper autour des cheminées", du texte de mon livre Tous les châteaux de la Loire dans lequel j'ai aussi écrit que ce "chateau est lui-même la couronne et se passe d'un souverain", et aussi "un gros diamant au milieu de la France, avec l'écrin qui lui convient: un parc grand comme Paris, entouré du plus long mur d'Europe". Décidément, c'est à Chambord que Michel Chasseuil doit installer ses vins, sous l'escalier de Léonard de Vinci.

lundi, juillet 23, 2012

Silicone Cristal

Jeune déjà j’étais choqué par la vue à la télé des gagnants de Formule 1 s’aspergeant de magnums de Moët et Chandon. J’aime trop le Champagne pour accepter qu’il soit ainsi dilapidé, fût-il générique et issu d’une grande entreprise industrielle ; ce vin, le plus élaboré, le plus travaillé qui soit, le moins naturel, mérite le respect. Bon, après tout, les pilotes de course avaient risqué leur vie ; ceux qui avaient survécu, puis gagné une place sur le podium des sponsors, pouvaient bien extérioriser leur soulagement et leur joie par cette éjaculation symbolique. Bien. Du magazine Marianne, Juillet 2012, sont extraits les textes en italique, et logiquement en gras, car c’est de gras qu’il s’agit (article Saint-Tropez, la ville de toutes les décadences, marronnier d’été) : Tout le monde en encore en tête cette fameuse soiré de 2009 où 1,2million d’euros ont été dépensés dans la boîte de nuit de (X… inutile de faire de la publicité à ce triste sire qui accepte de vendre du champagne pour qu’il ne soit pas bu, quand je me souviens de ces cuisiniers qui, avant d’autoriser à sortir des grands crus de leur cave, demandaient par qui et avec quoi ils seraient bus.) Il s’agissait d’une « battle » entre deux milliardaires, etc. Dans les vignes on plante, on élève, on taille, on traite, on récolte, bref on travaille (on entend par là le concours de celui qui paiera la facture de champagne la plus lourde).La presse du vin est une opération délicate (des serveurs accourent vers une table en brandissant une bouteille, des feux de Bengale crépitent pour attirer l’attention de tous. Cela signifie qu’un client vient de dépenser 10.000 € en champagne). La grandeur du champagne vient de la qualité des vins nature (quand la bouteille est remise à l’heureux commanditaire, les habitués protègent leur brushing en s’éloignant de quelques mètres…), et de la complexité de son élevage (…au cas où il déciderait de doucher ses invités). Le champagne à la mode pour l’aspersion est le Cristal Roederer, qui mérite mieux. Certes on peut dire que ce post sent la jalousie et la rancœur. Et ça va de soi, on a tous envie de boire du Cristal. N’importe quel amateur ne peut être qu’attristé d’apprendre qu’une part - laquelle ? de la production de Cristal Roederer finira non dans le palais du tsar, qui au moins le buvait, mais sur la poitrine des starlettes de ses successeurs. J’ai eu la chance d’être invité à l’anniversaire d’un ami où le grand champagne coulait à flots. On y a bu du Cristal Roederer, du Dom Pérignon et deux autres grands champagnes. Si quelqu’invité s’était permis de prendre une bouteille pour la faire mousser alentours, je suppose qu’on l’aurait haché menu et livré aux homards. On a respecté le vin, parce qu’il était très bon, et parce que derrière il y avait du travail, des hommes, et de la terre. Quant aux deux autres Champagnes, ils sont trop rares et bons pour être livrés à Saint-Tropez !

mardi, juillet 17, 2012

Où migrera le Château La Bécasse?

Ainsi donc, le Château La Bécasse, après tant d'autres crus du Médoc, va fermer son bec pour intégrer le Château Latour. C'est chose courante depuis longtemps, alors qu'il est bien rare maintenant qu'un grand cru doive vendre des terres (dans ce cas, c'est tout ou rien). J'ai connu La Bécasse dans les années 1980. Il était distribué en Bretagne Intérieure par un ancien instituteur, qui à 75 ans attribuait sa forme (olympique) à la pratique du vélo, chaque jour, et à une bouteille de ce vin, chaque jour aussi. Le vin n'était pas trop cher, et j'ai investi surtout dans l'excellent 1985 pour mon restaurant La Truite de Quénécan. Le sigle en était un rond comportant en haut une bécasse, en bas une truite, car nous avions des deux en abondance. Aujourd'hui je n'ai plus de truites (j'ai des brochets), mais j'ai encore pas mal de bécasses en saison dans cette Bretagne Intérieure qui est un lieu de passage privilégié de ce si bel oiseau. Bien donc. Une belle marque va disparaître, victime je le suppose de l'indivision et des droits de succession, victime aussi de la concentration du vignoble. Il en restera quelques-une, de bécasses: chez Chapoutier, ou au domaine de La Mordorée à Lirac, d'où Monsieur Delorme venait chasser ici. De toutes façons, la bécasse est une grande migratrice: avant que d'être à Pauillac, elle s'était posée à Saint-Julien (photo), du temps de Louis Fonteneau, régisseur du château Ducru-Beaucaillou. Puis, son petit-fils Georges Fonteneau transféra le vignoble à Pauillac. Puis ce fut vendu. J'ai en forêt de Quénécan trois jolies terrasses aux murs de pierre, au-dessus d'un vieux manoir. J'y ai un jour accompagné Georges Fonteneau, et nous n'avions pas levé grand chose. J'ai pour voisin Monsieur Borie de Ducru-Beaucaillou, qui a près de chez nous sa chasse de bécasse. Que de signes... Si le breton fervent qui a acheté La Bécasse est désireux de garder un souvenir de la marque, sur ces trois jolies terrasses on pourrait planter quelque chose! Pas du rouge sans doute, enfin pas tout de suite. Mais le terrain, en altitude, n'est pas gélif, et la mordorée offre toutes les couleurs. J'y verrais bien un bon chenin aussi incisif qu'un coup d'aile d'une bécasse qui s'envole. Outre le Muscadet, bien sûr, nous avons désormais en Bretagne quelques bons petits vignobles, comme les Coteaux du Braden à Quimper ou ceux de Saint-Suliac sur la Rance
. Il n'y en a pas encore en Bretagne Intérieure, pourquoi pas en Kost ar C'hoat? Gilles du Pontavice, expert en vins, administrateur de l'Association pour le renouveau du vin breton.

lundi, novembre 28, 2011

Cheval-Blanc 1947


Bonsoir Monsieur du Pontavice,J'en appelle à votre immense savoir sur le vin. Je sais que vous ne devez pas avoir beaucoup de temps mais pourriez vous m'aider pour la bouteille suivante? J'ai acheté sur internet un magnum de château Cheval Blanc 1947 mais l'étiquette n'est pas l'étiquette habituelle de Cheval Blanc (voir photo en annexe). Avez-vous déjà vu une telle étiquette? S'agit-il bien d'un Château Cheval Blanc? Et si oui quelle est l'histoire de cette étiquette?Et pour finir quelle est la valeur approximative de ce magnum?Meilleures salutations du Valais en Suisse.R.
Bonjour,excusez-moi de vous répondre tardivement. C'est bien une étiquette de Cheval-Blanc, je ne vois pas pourquoi on ferait un faux avec cette étiquette. Le négociant Fourcaud-Laussac était à l'époque propriétaire du château. Le vin a été expédié en barrique avec les étiquettes. Après, tout est possible, mais ça semble correct. C'est plus le niveau du vin qui me semble inquiétant. Je ne pourrais que lui donner une cote très basse, disons X.. euros.Bien à vous,Gilles du Pontavice
Bonsoir Monsieur du Pontavice,Un grand merci pour votre réponse et pour vos explications sur l'origine de cette étiquette. C'est vrai que le niveau est bas mais à la lumière ce vin n'a quasiment pas de signes d'évolution ce qui est un bon signe il me semble. Merci également pour votre estimation qui m'a rassuré car je l'ai acheté moins que votre estimation basse.Meilleures salutations du Valais en Suisse R.
Boujour,dans ce cas, c'est un risque très jouable vu la rareté et la grande qualité de ce vin. Vous avez bien fait. Cheval-Blanc 47 est un grand vin, qui figure parmi les "100 bouteilles extraordinaires" du livre de Michel Chasseuil auquel j'ai collaboré. Ne tardez cependant pas trop à l'ouvrir!Gilles du Pontavice

vendredi, janvier 28, 2011

Coulée de Serrant, 17 millésimes


17 millésimes de Coulée de Serrant, du jamais vu!
Une première journée de travail pour commencer à classer les milliers de bouteilles qui seront vendues samedi 29 janvier au Moulin de Neuville dans la Sarthe. Le plus excitant, ce n'est pas les très nombreux grands crus de Bordeaux (quoique...) mais les verticales de vins de Loire que j'ai annoncées... et qu'il faut maintenant retrouver dans les cartons.
Le cadre: une salle entourée par la rivière La Sarthe qui gronde, mais ne débordera pas. Le catalogue? Plus de 600 lots, dont la plus belle carte des vins de Loire sans doute.
Le catalogue est bien sûr sur VinorumCodex et les téléchargements continuent.

dimanche, décembre 19, 2010

Lafite IV (non, Carruades)

On m'appelle. 3 caisses de Carruades 2008, ça m'intéresse? Bien sûr, pour garnir la page des offres de grands vins de VinorumCodex. A quel prix? J'en sais rien, mon cher Monsieur, j'en sais rien. Ca vient de sortir, ça valait 53 euros en primeur, ce que je trouve déjà très cher. Je hasarde 200, il me répond qu'il a déjà preneur à 270... Bon, on va essayer à 280 alors. Lui aussi est bien conscient que c'est du grand n'importe quoi, la seule question à se poser est de savoir quand tout ça va s'arrêter. Certes le Château Lafite va imprimer un idéogramme chinois sur ses bouteilles de 2008. Mais le malheureux Mouton-Rothschild, nettement décroché, riposte par une étiquette signée de Xu Lei, un peintre... chinois. Mes ancêtres actionnaires de la Compagnie des Indes seraient bien étonnés de ce renversement spectaculaire, qui fait que c'est aujourd'hui Lorient et le port de la Lune qui courtisent l'Empire du Levant!

vendredi, décembre 17, 2010

Lafite III

Ce n'est pas tous les jours que je cite le "Quotidien du Peuple!". Mais après Lafite, je constate l'augmentation importante du Pavillon Rouge. Est-ce destiné aux dignitaires du Parti communiste chinois?

"Récemment, le prix des vins Château Lafite, grand cru français du niveau le plus élevé, a connu une hausse de mille en dix mille yuans en Chine, ce qui a provoqué l'avertissement de Xie Guozhong, célèbre économiste chinois : la débâcle s'approche et il vaut mieux les vendre le plus tôt possible. Malgré son avertissement, pas mal d'experts du milieu sont convaincus que le marché à la hausse continuera au moins pendant deux ou trois ans.

Le prix des vins Château Lafite vaudra t-il celui de l'or dans dix ans ?

Aux yeux de la plupart des Chinois, le Château Lafite est tout quand on parle de grands crus mondiaux. Suite à une demande et une aspiration folles, le prix du Château Lafite a augmenté à une vitesse fulgurante. « Dans les dix années passées, le prix de l'or a augmenté 4 fois, alors que la hausse du prix des Château Lafite fabriqués en 2000 est deux fois supérieure à celle de l'or, soit une augmentation de 9 fois par rapport à la même période d'il y a dix ans. » a remarqué Xie Guozhong, « Si cette hausse de prix se maintient dans les prochaines dix années, un grand Château Lafite aura un prix égalant celui de l'or si l'on calcule selon le poids.

Les capitaux flottants font monter le prix du Château Lafite

« Sur place de vente aux enchères des Château Lafite, 90% des visages sont des visages extrême-orientaux. Pour répondre à cette demande géante, Château Lafite a commencé ces dernières années à proposer une commande globale. La ruée sur les vins Château Lafite des capitaux flottants de Wenzhou (province du Zhejiang) a connu son pic. Ils achètent les vins non seulement chez les intermédiaires bordelais, mais aussi sur une échelle mondiale, comme à Singapour, aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne » a révélé au journaliste Fang Jun, un observateur des vins chinois expérimenté.

Un célèbre économiste chinois prévoit la débâcle

Si Xie Guozhong a lancé l'alarme au sujet du Château Lafite, c'est parce que le prix du Château Lafite a connu une explosion sur le marché chinois.

Xie Guozhong a comparé la folie sur le Château Lafite à la bulle Internet en 2000. « Même si certaines sociétés ne valaient pas un sou, leur valeur au marché boursier a atteint des milliards de dollars, alors que certaines bonnes sociétés ontégalement eu un prix plusieurs fois supérieur à leur valeur réelle. Château Lafite appartient à ces dernières. »

Si l'achat des Château Lafite devient un investissement, c'est parce que le vin peut être conservé pendant 10 ou 20 ans, et sa valeur ne cesse d'augmenter, selon Xie Guozhong. « Pourtant, son coût de transaction est très élevé, de même que son coût de conservation. Par rapport aux autres collections, le vin s'altère facilement. C'est pour cela qu'il ne pourra jamais devenir un produit d'investissement populaire. »

Bien que Xie Guozhong anticipe avec pessimisme sur le Château Lafite, son avis n'est pas partagé par la plupart des experts du milieu.

Selon Tie Li, un expert chinois expérimenté en marketing du vin, d'ici 4 ou 5 ans, l'économie chinoise connaîtra encore un développement rapide, et le Château Lafite aura toujours un marché à la hausse pendant quelques années.

« C'est vrai que le Château Lafite est follement poussé à un prix très élevé. Mais la possibilité de débâcle est très faible. Après la vague du Château Lafite, ce sera l'entrée du Margaux, un des 5 grands crus, sur la plateforme d'opération des capitaux flottants. Comme le prix des Margaux va augmenter, celui des Château Lafite ne devrait pas connaître une chute de grande envergure » a révélé au journaliste Zhu Sixu, président de l'association des boissons alcoolisées de la province du Guangdong.

Selon Xie Guozhong, au moment où la Chine appliquera des restrictions monétaires pour lutter contre l'inflation, le prix du Château Lafite cessera d'augmenter, comme le marché immobilier chinois. « Cette situation se produira en 2012. Pourtant, maintenant, c'est le moment favorable pour vendre ses vins Château Lafite. »

Cependant, Xie, qui insiste sur cette anticipation pessimiste, a avoué en même temps que le Château Lafite possède déjà la capacité de résister à des chocs. « Il a réussi à passer la crise financière de 2008, où l'augmentation de son prix a connu une courte pause pour créer sans cesse des records ensuite »."

Lafite II

Article publié sur Drinks Media Wire par Guillaume Jourdan, traduction écourtée de Gilles du Pontavice
Si vous vendiez vos bouteilles de Château Lafite maintenant comme le conseille l’économiste chinois Andy Xie?
Andy Xie est un économiste qui a quitté Morgan Stanley après avoir décrit dans un e-mail Singapour comme un terminal de blanchiment d'argent. Sa conclusion est sans ambiguïté: Vendez vos bouteilles de Château Lafite, maintenant. Après la lecture de cette analyse intéressante, je donne ici quelques observations sur quelques points, il fait avant de donner sa conclusion personnelle.

1) "Comme pour les autres actifs, la force de la bulle repose sur de faibles taux d'intérêt."
Andy Xie a certainement raison sur un court terme, mais sur un plus long terme, on peut imaginer que le marché chinois se développe sur une énorme population de consommateurs de vin (et pas seulement des vins).

2) "Dans la bulle Internet 2000, beaucoup d'entreprises ne valaient rien, mais se négociaient à des milliards de dollars de capitalisation boursière. Certaines ont été très bonnes, mais ces entreprises avaient un prix plusieurs fois supérieur à leur valeur intrinsèque. C’est la même chose pour Lafite."
Au moment de la bulle internet, les cours des actions pour toutes les entreprises (toutes, et non seulement une sélection d'entre elles) ont été vertigineux. C'est en fait ce qui explique l'éclatement de cette bulle en 2000. Aujourd'hui, s'il ya une bulle sur les prix du vin, elle est strictement limitée à très peu de vins, qui sont en fait de très haute qualité. Pour le vin – ce qui rend la comparaison avec des sociétés internet un peu biaisée - la qualité est toujours une préoccupation majeure quand il s'agit de l'investissement.

3) «L'accident, quand il se produit, est lié à un accident sur le marché américain, ce qui oblige la Fed à resserrer sa politique monétaire. C'est probablement ce qui va arriver en 2012. Pourtant, c'est maintenant le bon moment pour vendre vos Lafite."
C’est vrai, mais dans ce scénario catastrophe, on peut aisément comprendre que tous les vins, non seulement Lafite ou les vins de luxe, seront concernés. En fait, tous les actifs en général seront plus ou moins touchés par cette situation.

4) "En termes de poids, Lafite est plus cher que l'argent, même pour une mauvaise année, et presque dix fois plus cher pour un grand millésime comme 1982."
Il s'agit d'une très bonne réflexion, et elle montre comment Château Lafite a créé sa propre bulle dans le marché du vin de luxe.

5) " Les grands de châteaux Bordeaux se comportent comme des entreprises Internet en 2000. Ils vendent une petite proportion de chaque millésime. La pénurie déclenche la frénésie du marché."
À un prix aussi élevé, vous y pensez à (voire plus) avant d'ouvrir une bouteille, et vous préfèrez le garder pour une occasion très spéciale, si vous ne le vendez pas. Donc à la fin, moins de bouteilles sont bues que par le passé, même si comme on le dit elles le sont pour enrichir des relations d'affaires .

Alors, une bulle spéculative ? Oui. Un krach à venir ? Nous ne le savons pas. En fait, en raison de sa croissance rapide et impressionnante, la Chine est confrontée au problème de l'inflation. Et les vins fins sont plus ou plus acquis afin de faire un investissement. En ce sens, les prix de Lafite et les prix de certains autres domaines haut de gamme seront touchés. Mais la Chine est un marché croissant de consommateurs de vin. Une large communication autour du vin a été réalisée, notamment grâce aux vins exclusifs et très coûteux. Les chinois lisent sur le vin, et s’éduquent à travers les récits des domaines les plus célèbres et les prix de leurs vins. Qu’en sera-t-il de cette explosion de la bulle? Seul l'avenir peut le dire. Mais ce que l'histoire nous le dira, c'est que grâce à ce battage énorme autour des grands vins, la Chine s’est découvert un goût pour le vin, et ce marché se développera bien dans l'avenir pour devenir une destination d'affaires important pour n'importe quel domaine viticole. Sans ce battage autour des grands Lafite, l'aspiration d'une grande population chinoise à découvrir le monde de vins se serait certainement développé beaucoup plus lentement.

Lafite I


Lafite I
I, parce qu’on est parti je le crois pour une série à rebondissements. A vrai dire, j’ai pris le train en marche, je voyais bien que les cours montaient et j’en tenais compte sur VinorumCodex… et puis quand, à ma dernière vente de Rennes, j’ai vu deux amateurs se battre sur deux malheureuses bouteilles de Lafite 1992, et les porter à 840 euros, je me suis dit qu’il était temps de s’en occuper. Les chinois achètent du Lafite, aussi des Carruades de Lafite, peut-être même du Laffitte-Carcasset, un chinois vient d’acheter un domaine de Bordeaux Supérieur qui comporte le nom de Lafite.
Bref j’ai relancé mes offres de grands vins abandonnées faute de temps, et j’ai commencé avec 7 bouteilles de Lafite, bien vendues et en un temps record.
Puis on m’a proposé un beau lot de 70 bouteilles et 20 magnums, que j’ai vendus pour 57.200 euros. Ca commence à valoir le coup. Mais jusqu’à quand ? Lafite n’est pas un vin rare, et combien sont les acheteurs ?

jeudi, juin 17, 2010

Primeurs 2009, la suite

Pour un observateur comme moi, qui n'ai pas l'intention d'investir dans les 2009 en primeur, le ballet auquel nous assistons est assez cocasse: des crus qui se haussent le col pour se vendre au-dessus du voisin, ne serait-ce que d'un euro; des sites qui mettent en ligne un vin, puis annoncent dix minutes plus tard qu'il est épuisé, avant de le remettre en vente en seconde tranche, et plus les tranches sont fines plus le prix est élevé. Les seconds vins se vendent au prix des premiers. L'Evangile passe la barre des 200 euros hors taxes. A l'heure où j'écris, Les Forts de Latour viennent de sortir à un prix public HT très étudié: 99,90 euros ( contre 79 en 2005 et 47 en 2000, pour ne citer que les deux derniers millésimes du siècle). On attend que les premiers crus daignent s'offrir.

mardi, juin 15, 2010

Thunevin et les primeurs 2009

Aujourd'hui sortie de Pontet-Canet à 80 euros HT, presque 100 euros TTC. Certes, ce vin est proche du niveau des premiers crus, mais quand même... ces derniers ne pourront réagir qu'à la hausse. Puis La Dominique à 31 HT, heureuse surprise. Virginie de Valandraut était sorti à peu près au tarif des 2000 et des 2005, La Dominique se contente d'une augmentation de 20%, et est même moins cher qu'en 2005. Faut-il y voir un signal de Thunevin? Je pense que oui. Après avoir mené en tête la course des primeurs pendant quelques années, Valandraud s'était replié à un rang plus modeste, quoique non négligeable. L'aura dont bénéficie Jean-Luc lui permettra peut-être de ralentir une course qui, pour le citer, "tous les ans situe, restitue la valeur de la marque". Bref, une affirmation du statut social dans le monde des vins de Bordeaux, qui reste très "Ancien Régime", n'en déplaise aux dégustateurs.

Primeurs 2009

2 PRIMEURS 2009
Comme chaque année, VinorumCodex.com recense les prix de sortie des vins vendus en primeurs, environ 700 crus chaque année. Cette année, nous avons pris du retard, qui sera vite comblé. Actuellement, 630 vins sont pris en compte, avec le meilleur tarif recensé et le lien vers le site marchand (disponible pour les abonnés en cliquant sur l’intitulé du vin). 2009 est un grand millésime, et ça va se payer en hausse (comme d’ailleurs l’abonnement à VinorumCodex, souvent promis, jamais réalisé depuis 2004).
A Bordeaux, les grands vins se font attendre. Si vous en trouvez un à un tarif défiant toute concurrence, vérifiez quand même que ce n’est pas un 2008, car sur certains sites il est facile de se tromper… La question qui angoisse tous les acheteurs est de savoir si les premiers crus sortiront à plus, ou à moins de 6 euros le centilitre. Pontet-Canet vient de sortir, ratant d'un cheveu la barre des 100 euros TTC la bouteille... Les Pagodes de Cos à 49, ça laisse augurer d'une hausse vertigineuse. J’ai pensé qu’il serait utile de donner quelques indications sur les différentes maisons qui proposent ces primeurs ; bien sûr, c’est parcellaire à ce stade des sorties, bien sûr certaines maisons ne sortent qu’un seul tarif à la fin de la campagne, bien sûr ceux qui ont des exclusivités sont forcément les moins chers, etc… mais cela est une indication. Comme d’habitude, on constate que les marchands purement Internet sont en général plus chers que les marchands traditionnels. Il s’agit donc d’un instantané sur un milliers de prix enregistrés, qui inclut les ex-aequo.
La cave d’Ulysse, très grosse offre, se classe au meilleur prix pour 74% des vins de son tarif. Estève pour 64%. Dubecq pour 56%. Mondovino pour 47%. ChateauInternet, autre très importante offre, pour 45%. Millésima pour 38%. Chateauprimeur pour 37%. Lavinia et Ariès pour 36%. Wineandco pour 30%. Chateauonline pour 29%. A suivre…
Quant aux prix, ils sont redoutables. Quelques exemples tirés de la base VinorumCodex, qui entretient la mémoire du prix des vins (nous venons de passer le cap des 75.000 vins, et avons maintenant en mémoire 464.000 cotes anciennes et actuelles) :
Les Pagodes de Cos, second vin de Cos d’Estournel, ça valait en primeur 23 euros pour le millésime 2003 ; pour 2005, c’était 27 euros ; pour le 2005, c’est 49.
Pour quelques crus comme Berliquet, Fombrauge, Grand Pontet, Haut-Marbuzet, La Couspaude, La Fleur de Bouärd, La Fleur de Gay, L’Arrosée, Monbousquet, Moulin-Saint-Georges, Rauzan-Gassies, Taillefer, Clos René, Domaine de L’A, Virginie de Valandraud, qui sortent moins cher ou au même prix que leur 2005, la plupart des 2009 connaissent de grosses hausses. Comme la mémoire est courte, je signale cependant que pas mal de vins étaient encore plus chers en 2000, que plus personne ne se risque à qualifier de « millésime du siècle ».
Ainsi Beauregard : 29% de plus que le 2005, mais 11% de moins que le 2000.
Grand-Mayne : 5% de plus que le 2005, mais 14% de moins que le 2000.
La Fleur de Gay : 4% de moins que le 2005, 16% de moins que le 2000
La Gomerie (mais là aussi il s’agit de cuvées confidentielles, et les modes passent) : 90% de moins que le 2005, 280% de moins que le 2000 !
La Grave à Pomerol : 11% de moins que le 2005, 6% de moins que le 2000.
Labégorce, très sage : 11% de moins que le 2005, 22% de moins que le 2000.
Rouget : 27% de plus que le 2005, mais 13% de moins que le 2000.
Tertre-Roteboeuf : 23% de plus que le 2005, mais 20% de moins que le 2000.
Yon-Figeac : 31% de moins que le 2000.
Vous voyez bien que les prix baissent, parfois !

Mais dans l’ensemble, les hausses sont fortes, surtout sur les merveilleux médocs. Voici encore (encore) un petit palmarès des hausses, cette fois par rapport au millésime 2008, moyen mais récent, et à la référence 2005 :
Duhart-Milon : plus 87% (2008), plus 59% (2005).
Cantemerle : plus 82% (2008), plus 34% (2005).
Giscours : plus 76% (2008), plus 8% (2005).
Clerc-Milon : plus 73% (2008), plus 45% (2005).
Haut-Bages-Libéral : plus 68% (2008), plus 23% (2005).
Gruaud-Larose : plus 67% (2008), plus 15% (2005).
Gazin : plus 65% (2008), plus 45% (2005).
Lafon-Rochet : plus 60% (2008), plus 29% (2005).
Les Ormes de Pez : plus 58% (2008), plus 14% (2005).
Beauregard : plus 55% (2008), plus 29% (2005).
Poujeaux : plus 55% (2008), plus 13% (2005).
Gloria : plus 54% (2008), plus 26% (2005).
Rouget : plus 48% (2008), plus 28% (2005).
Durfort-Vivens : plus 48% (2008), plus 9% (2005).
Batailley : plus 46% (2008), plus 10% (2005).
Ferrière : plus 44% (2008), plus 12% (2005).
Camensac : plus 40% (2008), plus 30% (2005).
La Tour Carnet : plus 40% (2008), plus 13% (2005)
Monbrison : plus 40% (2008), plus 38% (2005).
Vous avez donc une idée des coefficients à appliquer pour prévoir le prix des premiers crus. Bon courage aux acheteurs.

mercredi, avril 21, 2010

Bordeaux Primeurs 2009

Enfin un grand millésime, de l'avis unanime! VinorumCodex.com publiera comme chaque année les meilleurs prix recensés sur environ 400 vins de Bordeaux, ainsi que sur de nombreux crus d'autres régions de France. En attendant, voici une revue de 250 vins que j'ai goûtés cette année, lien ci-dessus. Pas un travail d'oenologue, mais quelques notes pour prendre date.
Bonne lecture...

dimanche, décembre 13, 2009

La vente de La Tour d'Argent

PARIS - La vente aux enchères de 18.000 bouteilles de vins et spiritueux du restaurant parisien La Tour d'Argent a atteint plus de 1,5 million d'euros, annoncent les organisateurs dans un communiqué.

Mais les résultats de cette vente ne seront pas pris en compte pour l’argus VinorumCodex. En prenant connaissance des résultats, j’ai été ébahi du montant des enchères. Je vendrai demain à Rennes un Armagnac Laberdolive de 1935 pour environ 100 euros. Pourquoi s’est-il vendu quatre fois plus cher à Paris ? Pourquoi des vins assez répandus ont-ils atteint le double de leur valeur dans le commerce ? Tout simplement parce que la vente de La Tour d’Argent a fait depuis plusieurs mois l’objet d’une campagne médiatique jamais connue, les télés se bousculant pour annoncer chaque nouvelle distillée. Du grand art de la communication. Alors que le catalogue de de Clouet donnait honnêtement des estimations conformes aux lots, et notamment à l’état médiocre de beaucoup de bouteilles âgées de quelques décennies. Bref, la vente au prix fort de bouteilles peu dignes d’une grande table, si l’on en juge par les niveaux des Sauternes, les étiquettes souvent très abimées, signe d’une conservation en cave trop humide. Qui a acheté ? J’ai appelé un collectionneur ami qui était dans la salle avec sa télé de la semaine :
« Qui a acheté ? Des pauvres gens qui montaient les uns sur les autres, devant les professionnels qui rigolaient… du tir aux pigeons »
1363 euros frais compris (et les frais étaient de 24%, un autre record à ma connaissance) pour une très vilaine bouteille de Gruaud-Larose 1970, mise de négoce et en vidange, ça laisse perplexe. Passons sur les 25.000 euros d’une bouteille de Cognac du XVIII°, c’était de la charité. Notons la petite enchère de 124 euros pour un Corton 1895 marqué « Tour d’Argent » et pour cela estimé 1000 euros, mais qui était très sale et en vidange. C’est l’un des rares résultats inférieurs à l’estimation.
Ceci dit, personne n’est obligé d’acheter. Mais après ce succès, gageons qu’on va revoir des ventes du siècle chez nombre de grands restaurants.
Comment les medias vont-ils assumer ce succès gigantesque au détriment d’acheteurs peu avertis ? Un élément de réponse ce dimanche 13 décembre à 22H35.