dimanche, décembre 13, 2009

La vente de La Tour d'Argent

PARIS - La vente aux enchères de 18.000 bouteilles de vins et spiritueux du restaurant parisien La Tour d'Argent a atteint plus de 1,5 million d'euros, annoncent les organisateurs dans un communiqué.

Mais les résultats de cette vente ne seront pas pris en compte pour l’argus VinorumCodex. En prenant connaissance des résultats, j’ai été ébahi du montant des enchères. Je vendrai demain à Rennes un Armagnac Laberdolive de 1935 pour environ 100 euros. Pourquoi s’est-il vendu quatre fois plus cher à Paris ? Pourquoi des vins assez répandus ont-ils atteint le double de leur valeur dans le commerce ? Tout simplement parce que la vente de La Tour d’Argent a fait depuis plusieurs mois l’objet d’une campagne médiatique jamais connue, les télés se bousculant pour annoncer chaque nouvelle distillée. Du grand art de la communication. Alors que le catalogue de de Clouet donnait honnêtement des estimations conformes aux lots, et notamment à l’état médiocre de beaucoup de bouteilles âgées de quelques décennies. Bref, la vente au prix fort de bouteilles peu dignes d’une grande table, si l’on en juge par les niveaux des Sauternes, les étiquettes souvent très abimées, signe d’une conservation en cave trop humide. Qui a acheté ? J’ai appelé un collectionneur ami qui était dans la salle avec sa télé de la semaine :
« Qui a acheté ? Des pauvres gens qui montaient les uns sur les autres, devant les professionnels qui rigolaient… du tir aux pigeons »
1363 euros frais compris (et les frais étaient de 24%, un autre record à ma connaissance) pour une très vilaine bouteille de Gruaud-Larose 1970, mise de négoce et en vidange, ça laisse perplexe. Passons sur les 25.000 euros d’une bouteille de Cognac du XVIII°, c’était de la charité. Notons la petite enchère de 124 euros pour un Corton 1895 marqué « Tour d’Argent » et pour cela estimé 1000 euros, mais qui était très sale et en vidange. C’est l’un des rares résultats inférieurs à l’estimation.
Ceci dit, personne n’est obligé d’acheter. Mais après ce succès, gageons qu’on va revoir des ventes du siècle chez nombre de grands restaurants.
Comment les medias vont-ils assumer ce succès gigantesque au détriment d’acheteurs peu avertis ? Un élément de réponse ce dimanche 13 décembre à 22H35.

vendredi, octobre 16, 2009

Les prix des premiers crus

Un petit exercice de statistique permet d’évaluer la nouvelle hiérarchie des premiers crus de Bordeaux (Petrus non compté dans ce tableau).
J’ai examiné les 7 autres premiers crus en prenant en compte le total de leur cote du millésime 1990 au millésime 2002, soit des vins que l’on trouve couramment en vente publique. J’ai pris comme base 100 leur cours en 2005, puis calculé le cours de ces mêmes vins en 2007 et en 2009.
Comme on peut le voir dans les dernières campagnes primeurs, Mouton-Rothschild est quelque peu détaché du lot :Pour un prix moyen de 100 en 2005, ça donne 157 en 2007 et 142 en 2009.
Chiffres voisins pour Cheval-Blanc : 154 en 2007, 149 en 2009.Un peu plus haut se situe Haut-Brion : 170 en 2007, 156 en 2009. Là aussi la baisse des prix est sensible.
Ensuite vient Latour : 183 en 2007, 174 en 2009.Puis Margaux : 201 en 2007, 175 en 2009.
Ausone fait bien mieux, mais il partait de plus bas, et c’est le premier cru dont la qualité a le plus augmenté, et de plus c’est le plus petit : 182 en 2007, 214 en 2009. C’est le seul à progresser ces deux dernières années.
La star des ventes est évidemment Lafite : pour une base 100 en 2005, ça donne 233 en 2007 et 227 en 2009, une baisse très relative. A sa suite le second vin des Carruades nous étonne à chaque vente, tiré par l’export : 100 en 2005, 130 en 2007, 164 en 2009. Jusqu’où montera-t-il ?

mercredi, octobre 14, 2009

Index thématique

Il est toujours irritant de naviguer sur un blog en n'ayant accès, en tant qu'archives, qu'à des dates de mois. Il y a sûrement des choses intéressantes derrière, mais comment les trouver? Mon inexpérience du système Google ne m'a pas permis de trouver une solution interne. J'ai donc mis en ligne un index très rustique, mais qui au moins donne le titre des articles. Vous trouverez le lien sur la page de ce blog, dans le titre d'accueil.

samedi, octobre 03, 2009

11.600 euros pour un Carré d'As

11.600 euros, c’est le prix atteint le 21 septembre à Rennes, hors frais, par une caisse de 16 bouteilles du millésime 2000 (comprend les châteaux Haut-Brion, Latour, Margaux et Petrus). Une caisse que j’avais estimée 13.000 à 15.000 euros. En 2008, je la cotais 15.000, et en 2007 17.000 euros. Ce « Carré d’As » a une histoire qui mérite d’être rappelée et débuta en 1994... autant dire il y a une éternité !Cette année-là, les fidèles clients de grandes maisons de négoce de Bordeaux reçurent une étrange proposition: la vente de quatre premiers crus de Bordeaux, proposés en bouteilles ou en gros flacons, et du millésime 2000. Le prestige du millénaire allié au prestige des meilleurs vins du monde !Evidemment, il fallait payer d'avance. Et patienter jusqu'à l'automne 2000 pour savoir si le millésime serait exceptionnel, seulement bon ou médiocre. Car la météo se moque des célébrations du calendriers. Mais il faudrait encore patienter jusqu'au début de l'année 2001 pour savoir si l'immobilisation de capital six ans auparavant serait justifiée, en fonction des cours auxquels se vendraient alors les vins dans une nouvelle monnaie: l'euro Enfin, il faudrait bien patienter jusqu'au début de 2003, car ces grands vins seraient alors embouteillés, et enfin livrés à leurs heureux propriétaires.Huit ans d'attente, après tout, qu'est-ce que c'est, pour des vins qui seront si recherchés pour le réveillon de l'an 2100 ? On connaît la suite : le millésime 2000 donna de très bons vins, sans pour autant être l’année d’aucun siècle, comme le claironnairent les journaux. Quelques chiffres maintenant :
- En 1994, ce Carré d’As était vendu 10.000 francs, soit en argent constant 1.500 euros.
- Pour acheter ces 16 bouteilles en primeur en avril 2001, il en coûtait environ 5.000 euros.Une excellente affaire donc pour ceux qui y ont souscrit, et plus encore pour ceux qui ont su vendre à temps. Car un grand millésime chasse l’autre, surtout s’il est très grand comme le 2005.
- Par la suite, sa cote a fortement augmenté, pour dégringoler depuis l'été 2007. Je ne vois pas que cette cote doive augmenter dans un proche avenir. Après tout, le CAC se promène autour de 3700 points alors que le déficit et le chômage sont au maximum.

jeudi, mars 19, 2009

Premiers crus: la dégringolade

Je me suis livré à un petit exercice statistique consistant à examiner la variation de la cote VinorumCodex de 200 grands vins rouges de Bordeaux. Puis celle de 30 seconds crus ou assimilés ; enfin celle des 8 premiers crus. La lecture en est très fastidieuse, mais pleine d’enseignements je crois.
Millésime 2005 : de 2008 à 2009, sur les 200 vins de Bordeaux, baisse de 3,8%, sur 30 seconds hausse de 1%, sur les 8 premiers, baisse de 10%.
Millésime 2004 : sur les 200 vins de Bordeaux, baisse de 2% par rapport à 2008, mais hausse de 17% par rapport à 2007. Sur 30 seconds, moyenne des prix identique à celle de 2008, hausse de 11% par rapport à 2007. Sur les 8 premiers, baisse de 8% par rapport à 2008, mais hausse de 5,7% par rapport à 2007. En résumé, les vins sont un peu plus chers qu’en 2007, mais moins que l’année dernière ; et, bien sûr, nous ne sommes qu’aux premières ventes de l’année.
Millésime 2003 : sur les 200 vins de Bordeaux, baisse de 1% par rapport à 2008, hausse de 4% par rapport à 2007, de 20% par rapport à 2007. Sur 30 seconds, baisse de 1% par rapport à 2008, égal à 2007, hausse de 3% par rapport à 2006. Sur les 8 premiers, baisse de 3% par rapport à 2008, mais hausse de 4,5% par rapport à 2007… et de 41% par rapport à 2006.
Millésime 2002 : sur les 200 vins de Bordeaux, baisse de1,5% par rapport à 2008, hausse de 4% par rapport à 2007, de 25% par rapport à 2005. Sur les 30 seconds, hausse de 1,8% par rapport à 2007, de 14,5% par rapport à 2005. Sur les 8 premiers, baisse de 5,4% par rapport à 2008, hausse de 6,9% par rapport à 2007, de 71% par rapport à 2005.
Millésime 2001 : sur les 200 vins de Bordeaux, cotes égales à 2008, hausse de 8% par rapport à 2007, de 23% par rapport à 2004. Sur les 30 seconds, cotes égales à 2008, hausse de 2,7% par rapport à 2007, de 6,5% par rapport à 2004. Sur les 8 premiers, baisse de 1% par rapport à 2008, hausse de 27% par rapport à 2007, de 85% par rapport à 2004.
Millésime 2000 : sur les 200 vins de Bordeaux, cotes égales à 2008, baisse de 5% par rapport à 2000, hausse de 47% par rapport à 2003. Sur les 30 seconds, moyenne de cote égale à celles de 2008 et de 2007, hausse de 33% par rapport à 2003. Sur les 8 premiers, baisse de 2,1% par rapport à 2007, de 12% par rapport à 2007, mais hausse de 97% par rapport à 2003.
Millésime 1990 : sur les 200 vins de Bordeaux, baisse de 8,3% par rapport à 2008, de 10% par rapport à 2007, hausse de 32% par rapport à 2003, de 67% par rapport à 1999. Sur les 30 seconds, baisse de 2.8% par rapport à 2008, de 6.1% par rapport à 2007, hausse de 26% par rapport à 2003, de 60% par rapport à 1999, et tiens, allons-y, de 373% par rapport à 1995. Sur les 8 premiers, baisse de 26% par rapport à 2008, de 27% par rapport à 2007, hausse de 62% par rapport à 2003, de 102% par rapport à 1999, et tiens, allons-y, de 526 par rapport à 1995.
Je vous l’avais dit, c’est vraiment une lecture fastidieuse… Sauf sans doute pour quelques traders. Mais la traduction en graphiques de ces chiffres résumant des milliers de résultats de vente, c’est que les trois types de vins ont subi la même évolution des cours, plus lisse pour les 200 vins, plus exacerbée pour les premiers crus :
- ces 200 grands Bordeaux des millésimes 2000 à 2005 ont connu une hausse de prix assez régulière depuis cinq ans, culminant l’an dernier. La baisse est aujourd’hui minime, mais c’est la première fois depuis longtemps. Si l’on examine un millésime plus ancien, 1990, la situation est différente : hausse très forte depuis 2005, et baisse cette année bien plus importante que les millésimes récents.
- le même schéma appliqué à trente « seconds » ou assimilés ( les Palmer, Pape-Clément, Pavie, Pichon, etc…) donne des résultats similaires, excepté le fait que la hausse avait été plus importante au départ. Les cours de ces seconds se tiennent plutôt bien. J’en suis le premier étonné !
- quant aux premiers crus, leur correction est beaucoup plus sévère. La baisse des prix commence en 2007 et s’accentue beaucoup depuis six mois. Mais, et c’est là la conclusion générale de cette étude, tous ces vins sont encore nettement plus chers qu’il y a quelques années. Il y a à mon avis encore une grande marge de baisse des cours. Un exemple appuyé sur plusieurs ventes récentes : regardez la cote du Petrus 1989 sur VinorumCodex.
Je vous souhaite de bons achats, sans vous presser, car les bonnes affaires devraient se multiplier.