samedi, avril 09, 2016

Bordeaux primeurs 2015 : mercredi : crus bourgeois

Au château d’Arsac, passé le parc qui est très chouette et le château dédié à l’art contemporain, c’est comme chaque année la dégustation la plus éprouvante, celle des crus bourgeois. En petit millésime comme 2013, c’est un pensum dont on ressort le palais asséché.
Je n’ai pas pu faute de temps goûter grand-chose des 300 vins présentés. Je me suis contenté de ceux que je connais, de quelques nouveautés, et pour commencer des crus dont l’assemblage est fort en petit verdot et comprend parfois un peu de malbec ou de carmenère ; mais pour la plupart ce sont des vins à l’ancienne, pas toujours bien définis.

Voici une petite sélection. Sauf si l’appellation est précisée, ce sont des Médoc ou des Haut-Médoc :
Je ne connaissais pas le Château Caroline, un Moulis lié au Château Lestage (famille Chanfreau). C’est un beau vin noblement boisé, d’un beau grain, de bonne longueur.
Tour du Haut-Moulin est très bien, corpulent. Fleur La Mothe a un nez intense de vanille, la bouche est en retrait. Pontet Barrail, une belle robe, un nez vif, une bouche souple et longue. Belle-Vue est plein et coloré avec une belle finale. Deyrem-Valentin (Margaux) a un beau nez, la bouche est lisse et ronde. Tour Castillon est clair, avec un bon boisé et de la longueur. Maucamps est agréable, sur son fruit. Larose Perganson est réussi, avec une bouche ferme.

Voici maintenant quatre Margaux assez proches, du moins sur mes notes chiffrées : La Fortune est un beau vin, avec une excellente finale ; Haut Breton Larigaudière est un joli vin, souple et facile ; Pontac-Lynch est assez ferme ; un cran en-dessous, Paveil de Luze a un bon boisé, la finale est un peu faible.

Sacrifiant à la mode consumériste du « vin assemblé par l’acheteur », je me suis permis un verre assemblant ces quatre crus. Le résultat dépasse mes espérances, car il est meilleur que chacun de ces quatre crus : un beau nez vineux, surtout une fermeté et une rondeur en bouche supérieures. Me voilà Winemaker !

Un cran en-dessous, Cissac commence par un beau nez mûr, mais finit court. La Garricq (Moulis) est fin et souple. Gironville a de la rondeur. J’ai donné une note médiocre à Charmail, c’est peut-être injuste, le vin est fruité et la finale longue et sèche. Castéra est déjà évolué, avec de l’amertume. Bellevue de Tayac est fin, mais froid en bouche, froid comme l’estey éponyme de mon roman Margaux Interdit. Cambon La Pelouse, derrière une belle robe, se révèle léger. Clément Pichon manque de netteté. Laujac est facile. Du Taillan est léger, mais la finale n’est pas mal. J’ai aussi goûté Arsac, Les Trois Manoirs, Fontesteau, Saint-Aubin, Lacombe-Noaillac.

Une question me taraude depuis hier : à l’entrée de Margaux, face à la banderole mensongère qui annonce que Margaux est le vignoble le plus célèbre au monde (et le Champagne, alors ?), le café L’Indigo annonce sur la liste légale des consommations un « vin ordinaire au verre » à 2,50 euros. Clin d’œil, ingénuité, je-m’en-foutisme ? Nous décidons de tenter l’aventure, et je le goûte sur la terrasse, avec Palmer en fond d’écran. J’en bois même une lampée, puisque la journée est finie. J’ignore à qui sont les vignes qui ont recueilli ce liquide imbuvable. Quand je pense à tout ce que j’ai craché de si bon aujourd’hui !
Crédit photo: Martine Bleuzen du Pontavice

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